Le pouvoir de donner sa vie
homélie du Jeudi saint 2024
Qu’est-ce que ce geste du Christ, perdu dans l’immense souffrance de l’humanité ? Il donne sa vie, mais ce n’est qu’une vie, une vie perdue au milieu de tant d’autres, comme au Congo, à Gaza, en Haïti ou en Ukraine. Qu’est-ce que ce geste du Christ ? Nous sommes ici parce que ce geste a changé le cours de l’histoire, pour toujours. Et ceci parce que d’une part la vie du Christ était une vie spéciale, et que d’autre part il nous permet de lui unir tout ce que nous-mêmes vivons. Détaillons cela.
La foi agrandit notre vie
homélie du 2e dimanche de carême 2024
Si souvent, nous avons l’impression de marcher dans la nuit. Des choses arrivent dans notre vie que nous ne comprenons pas. Nous nous sentons abandonnés de tous, et même de Dieu en qui pourtant nous avons mis notre foi. Et lorsque nous prions, rien ne vient, nous avons l’impression de rester seul ; il n’y a ni paix ni consolation, ni encore moins une idée de comment sortir de ce marasme.
La famille, joie de la société
Contribution de la famille à un monde sauvé — conférence à Namur, 12 février 2024. La vidéo peut être regardée ici. Je recommande aussi chaleureusement le reportage « Une seule chair », épisodes 1 et 2.
« L’avenir de l’humanité passe par la famille », disait le pape saint Jean-Paul II en concluant il y a 42 ans son exhortation apostolique sur la famille. C’est encore plus clair aujourd’hui, bien que ceux qui le comprennent sont peu nombreux. L’humanité a besoin de la famille, mais plus encore la famille est pour l’humanité source de joie et d’espérance. La famille stable est plébiscitée parmi les valeurs recherchées par les jeunes, bien que dans les faits elle est trop souvent en péril (il y a là un manque d’éducation à la vertu, à l’endurance pour le bien. Nous pourrons y revenir).
Le diable est perdu!
homélie du 4e dimanche B, 28 janvier 2024
Écouter saint Paul (1 Co 7,32-35) nous fait comprendre que le célibat consacré ou le célibat des prêtres ne date pas du Moyen-Âge, comme on le répète trop souvent, mais qu’il remonte à Paul et à Jésus. Paul évoque ce choix de renoncer au mariage afin d’être plus libre de chercher comment plaire au Seigneur, afin d’avoir le souci de ses affaires et d’être attachés au Seigneur sans partage. C’est ce que l’Église propose depuis 2000 ans à ses prêtres (jadis d’ailleurs, également à ses diacres), d’abord sous la forme du renoncement à poursuivre la vie conjugale (cf. le synode d’Elvire ou le concile de Nicée), ensuite sous la forme de l’appel de célibataires uniquement (réforme grégorienne).
L’appel de Dieu prend toute notre vie
homélie du 14 janvier, 2e dimanche ordinaire de l’année B
{joomplu:150} Nous voilà placés devant l’appel de Dieu. Nous découvrons ainsi combien il se soucie des hommes. Il souhaite trouver des partenaires pour réaliser son projet pour l’humanité. Aujourd’hui l’appel de Dieu semble rare, si on se permet d’en juger par le petit nombre de ceux qui engagent leur vie à la suite du Christ. Mais on peut se demander si c’est l’appel qui est rare, ou si c’est plutôt la réponse. Car l’idée est très répandue que la vie de croyant peut se contenter d’une implication minimale, et j’ai déjà entendu que même pour le ministère des prêtres on ferait bien d’inventer une sorte de contrat à durée déterminée. L’histoire de Samuel évoque également une rareté de la vocation, et les disciples qui cherchent Jésus ne sont que deux au départ. Finalement, c’est la diffusion du christianisme qui va faire comprendre qu’il ne s’agit pas d’abord d’avoir des croyances, mais de se laisser appeler. L’Église est la communauté des appelés, et le mot ecclesia veut dire “les convoqués”. Le baptême, par lequel on devient chrétien, se présente comme la réponse à un appel du Seigneur, d’après ce qu’on lit dans les prières qui l’entourent. Il est normalement le début d’une vie nouvelle. Tous, vous bénéficiez d’une vocation, d’un appel de Dieu.
Adorer le Seigneur
homélie de l’Épiphanie 2024
{joomplu:533} En retrouvant l’étoile à la sortie de Jérusalem, les mages éprouvèrent une « très grande joie » et trouvèrent la maison où demeuraient Marie et Jésus enfant. Nous voudrions nous aussi éprouver cette très grande joie, et même vivre dans la joie. Cela nous est donné, car d’une part nous pouvons imiter les mages dans leur attitude, et d’autre part le Seigneur est là, présent aujourd’hui, avec Marie sa mère. Que le Seigneur est là, nous nous sommes évertués à nous le redire ces dernières semaines en plaçant des crèches là où c’est possible. Ces objets visibles nous rappellent la réalité que nous ne voyons pas de nos yeux : le Fils de Dieu, par qui tout a été fait (Col 1,16), s’est fait l’un de nous pour nous donner accès à son amitié. Dans les sacrements, nous le retrouvons encore plus sûrement. Quant à l’imitation des mages pour rejoindre cette réalité, elle réside dans ce simple mot : l’adoration.
Dieu s’engage pour la famille
homélie de la fête de la Sainte Famille 2023
{joomplu:552} La famille fait partie du projet de Dieu pour l’humanité. C’est par elle qu’il veut donner la vie, et qu’il veut la faire grandir dans l’amour, car l’amour est le milieu qui convient au développement de la vie. Ainsi, quand le Fils de Dieu vient dans le monde, il naît dans une famille, même si sa conception s’est passée d’une manière unique. Dieu aime la famille, et dès la création de l’homme et de la femme, la Révélation nous découvre le mouvement qui est à l’origine de la famille : après avoir fait entendre l’émerveillement de l’homme pour la femme, la Bible dit : « à cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme, et tous deux ne feront plus qu’une seule chair » (Gn 2,24). Tous, nous sommes né de l’union d’un homme et d’une femme, et en général, d’un homme et d’une femme qui s’étaient attachés l’un à l’autre, qui s’aimaient et voulaient construire quelque chose ensemble. La base de la famille devrait rester le mariage de l’homme et de la femme, cet engagement stable, ce don total que l’on fait de soi à l’autre afin de devenir source de vie. De nos jours, la technologie biomédicale tend à faire passer cette rencontre fondamentale à l’arrière-plan, mais au moins il reste ceci : tout être humain vient d’un homme et d’une femme.
Le Sauveur est né ; vivons de foi !
homélie de Noël 2023
{joomplu:543} Ça y est, le Sauveur est né, nous ne sommes plus seuls. Chassons les illusions qui nous feraient croire que Dieu est lointain, que nous devons assurer par nous-mêmes notre bonheur. Maintenant, vivons de foi, devenons des pauvres de cœur qui espèrent tout de Dieu puisqu’il est venu à notre rencontre. Devant la crèche, c’est à une véritable décision de foi que nous sommes invités : croire à l’amour, croire au sourire du Christ, faire alliance avec lui !
Marie, pleine de grâce
homélie du 4e dimanche de l’Avent, 24 décembre 2023
{joomplu:531} Je voudrais m’attarder aujourd’hui sur un mot qu’on dit souvent : Marie, pleine de grâce, comblée de grâce. C’est ainsi que l’archange Gabriel vient saluer Marie, et elle en est toute bouleversée, se demandant ce que pouvait dire cette salutation (Lc 1,28). En grec, la langue dans laquelle nous sont parvenus tous les livres du Nouveau Testament, il est écrit kékharitoménè. C’est un participe passé sous la forme accomplie, donc l’expression la plus intensive qui existe dans la langue. Ce mot ne veut pas simplement dire que Marie est bien jolie ou sympathique. Il est construit à partir d’un verbe rare, qui n’apparaît que deux fois dans la Bible, et la deuxième fois c’est dans la lettre de saint Paul aux Éphésiens, pour dire la grâce que Dieu nous a accordée en son Fils bien-aimé (Ép 1,6).
Nous ne sommes plus seuls
homélie du 3e dimanche de l’Avent, 17 décembre 2023
{joomplu:173} L’atmosphère de ce jour de Gaudete veut nous mettre à la joie. La joie parce qu’au milieu des détresses de ce monde nous sommes visités. Savoir que quelqu’un pense à nous, cela illumine notre cœur. Quand, au milieu de nos difficultés, quelqu’un nous fait comprendre que nous comptons pour lui, nous voilà fortifiés, réconfortés. Au moment de l’exil du peuple hébreu à Babylone, le prophète Isaïe peut dire « l’Esprit du Seigneur est sur moi ». Il voit l’intervention de Dieu ; il voit la délivrance accordée par le Seigneur ; il voit les humbles recevant la bonne nouvelle ; il voit le peuple uni à son Dieu comme la jeune mariée à son jeune époux (Is 61,1-11). Voilà que dans son malheur le peuple se sentait visité.
Offrir à Dieu des sacrifices
homélie du 20e dimanche A, 20 août 2023
{joomplu:16} Les apôtres voudraient que Jésus remballe la femme étrangère, mais Jésus en profite pour faire découvrir ce qu’il dira aussi à la Samaritaine une autre fois : le salut vient des juifs ; ce sont eux qui ont reçu les promesses de Dieu. La Syro-phénicienne se glisse dans cette réalité de l’alliance, en argumentant qu’il y a place pour ceux qui cherchent les miettes. Jésus saluera sa foi. Cette femme exprime une attitude assez répandue, où on attend de Dieu une intervention pour soulager notre vie. Aujoud’hui, bien des gens continuent de crier ainsi vers le ciel, et certains s’adressent au Fils de Dieu.
Marie et la victoire
homélie de l’Assomption, 15 août 2023
{joomplu:531} Avec l’ange Gabriel, nous disons de Marie qu’elle est pleine de grâce. Elle est la mère de l’auteur de la grâce, du Christ par qui nous viennent tous les dons du ciel. L’humanité a reçu le cadeau le plus inespéré, l’assurance de l’amitié de Dieu, l’assurance de ne plus jamais être seul, abandonné, rejeté.
homélie du Te Deum du 21 juillet
{joomplu:156} à partir du texte de Gn 2,4b-9.15
Lorsque nous ne cherchons pas de données scientifiques dans ce texte, nous y découvrons une réflexion puissante sur la place de l’homme dans l’univers et sa mission aujourd’hui. La réussite du monde est décrite comme le fruit d’une collaboration entre Dieu qui fait pleuvoir et l’homme qui travaille le sol. Une collaboration, non une concurrence. L’être humain lui-même a une double origine, une double parenté : parenté avec le monde matériel, puisqu’il est tiré du sol, comme tous les êtres vivants ; cette parenté nous est rappelée abondamment par la culture contemporaine qui veut voir dans l’homme un animal comme un autre. Mais il y a une autre parenté, la parenté avec Dieu, dont l’homme reçoit le souffle. De nos jours, les scientifiques ne cessent de s’étonner que la science basée sur les mathématiques permette de si bien connaître le monde qu’elle peut même prédire l’existence de ce qu’on ne connaît pas encore, comme on l’a vu avec le boson de Higgs. D’où vient que les mathématiques, qui sont le fruit de notre esprit, collent si bien avec l’univers où nous avons l’impression d’être jetés comme un accident ? Ne serait-ce pas, finalement, parce que nous avons reçu le souffle du Créateur, parce que notre esprit vient de l’esprit de celui qui a imaginé le monde ? Alors, l’être humain est bien plus qu’un animal comme un autre. Alors, il a vraiment une mission dans ce monde.
Ce sacrement ne s’approche qu’avec le cœur
homélie de la fête du Corps et du Sang du Christ, 11 juin 2023
{joomplu:568} Deux choses me frappent spécialement dans les lectures d’aujourd’hui. La manne, qui annonce l’eucharistie, est donnée au peuple dans un contexte où Dieu lui dit qu’il veut savoir ce qu’il a dans le cœur (Dt 8,2). Et Jésus annonce que le pain qu’il donnera, c’est sa chair, donnée pour la vie du monde (Jn 6,51). Dieu, qui est amour, s’intéresse à notre cœur. C’est par là qu’il peut nous rencontrer et qu’il peut nous combler. L’homme qui a le cœur ailleurs ne peut jamais comprendre le salut ; il reste étranger aux dons de Dieu, il n’en comprend que la dimension matérielle. Pour lui, les miracles devraient être des prodiges extérieurs, et il en conclut qu’ils n’existent pas ou qu’ils sont fort rares. Il n’en va pas de même pour l’homme intérieur, qui s’avance vers le Seigneur le cœur ouvert et plein de désir. Chez lui, Dieu a trouvé la porte d’entrée pour y déposer sa paix et sa joie.
Lettre des évêques scandinaves sur la sexualité humaine
J’ai beaucoup aimé le contenu et le ton de la lettre que les évêques du Danemark, de Suède, de Norvège, de Finlande et d’Islande ont adressé aux catholiques de leurs pays au début du carême. Alors je vous la partage ici.
Conferentia episcopalis Scandiae — Lettre pastorale sur la sexualité humaine — 5e Dimanche de Carême 2023
Chers Frères et Sœurs,
Les quarante jours du Carême rappellent les quarante jours pendant lesquels le Christ jeûna au désert. Mais ce n’est pas tout. Dans l’histoire du salut, les périodes de quarante jours indiquent des étapes dans l’œuvre de rédemption accomplie par Dieu et qui continue jusqu’à aujourd’hui. La première de ces interventions eut lieu au temps de Noé. Ayant vu la destruction dont l’homme était l’auteur (Cf. Gn 6,5), le Seigneur soumit la terre à un baptême purificateur. « La pluie tomba sur la terre pendant quarante jours et quarante nuits » (Gn 7,12), Ce qui en résulta fut un nouveau commencement.
Comment sommes-nous sauvés par la foi ?
homélie du 2e dimanche de Pâques, 16 avril 2023
{joomplu:565} Nous sommes frappés de la vitalité de la première communauté chrétienne : « chaque jour, le Seigneur leur adjoignait ceux qui allaient être sauvés », nous dit le texte des Actes des apôtres. Il était encore très frais dans la mémoire, l’événement par lequel Dieu avait vaincu la mort par la fidélité de son Fils bien-aimé jusqu’à la croix. Le mot « être sauvé » avait un contenu très concret : obtenir le pardon de ses péchés, recevoir le don de l’Esprit Saint, participer à la vie qui s’était révélée dans le Seigneur Jésus. Ils étaient du côté du Vivant, plus rien ne menacerait désormais leur existence, la vie éternelle leur était ouverte. Les biens matériels devenaient si relatifs devant cette grande vie qui s’ouvrait que c’était naturel de tout mettre en commun. La promesse de vie que Dieu avait réalisée balayait toutes les inquiétudes.
Le silence de Dieu quand il renverse le mal
Homélie du dimanche des Rameaux 2023
{joomplu:187} Chaque année nous écoutons le récit de la Passion du Seigneur Jésus et nous nous imprégnions de la façon dont Dieu affronte le mal. Cela nous permet de tenir lorsque nous aussi, dans nos vies, nous retrouvons face au mal. Ce qui me frappe aujourd’hui est le silence. Silence de Jésus qui étonne Pilate lorsqu’il ne lui répond plus rien. Silence du Père, qui fait crier Jésus « mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » Dans la Passion selon saint Matthieu de Jean-Sébastien Bach, au moment où Judas arrive avec la foule armée d’épées et de bâtons pour capturer Jésus, le chœur s’exclame : n’y a-t-il pas un tremblement de terre, un orage, un tonnerre déchaîné ? N’y a-t-il rien qui vienne du ciel comme intervention divine ? Cette question, nous nous la posons à notre tour lorsque le mal débarque dans notre vie. Mais à l’arrogance du mal — car le diable est rempli d’arrogance envers le Créateur et il nous l’enseigne comme il le peut — Dieu répond par le silence et par la fidélité de son Fils coûte que coûte. Et c’est ainsi qu’il terrasse le mal. Qu’il nous donne la force de le suivre le jour où c’est notre chemin à nous aussi ! Qu’il nous remplisse de fidélité pour remporter avec lui la victoire plutôt que de chercher une échappatoire du côté du malin. Si vous voulez vibrer à tout cela, je vous recommande ce très beau commentaire de la Passion selon saint Matthieu de Bach.
L’obéissance de la foi
homélie du 4e dimanche de l’Avent, 18 décembre 2022
{joomplu:524} Parmi les thèmes qui traversent les lectures de ce jour, il y en a un qui m’a semblé d’une urgence particulière : celui de l’obéissance à Dieu. Acaz refuse la main tendue de Dieu. Le psaume chante l’homme qui ne livre pas son âme aux idoles. Paul veut amener toutes les nations à l’obéissance de la foi. C’est de cette obéissance de Marie et Joseph que dépend la venue de l’enfant qui s’appelle « le Seigneur sauve », Jésus. Je voudrais détailler cela avec vous.
La résurrection des morts
homélie du 32e dimanche C
{joomplu:563} Aujourd’hui une minorité de gens croient qu’il y a une résurrection des morts. Il paraît que cela fait 10% de la population et seulement 13% de ceux qui se disent catholiques. Nous venons d’une époque, maintenant assez lointaine, où la considération de la vie éternelle guidait les décisions même des plus grands de ce monde. Mais il n’en a pas toujours été ainsi. À l’époque de Jésus nous constatons que les avis sont partagés. Une partie des Juifs se placent dans la ligne de ce que nous avons entendu dans la lecture du livre des Martyrs d’Israël : ces 7 fils qui ne craignent pas de rester fidèles à leur foi au péril de leur vie, affirmant que se préparer à la résurrection était plus important que chercher à sauver sa vie maintenant. D’autre part il y a ces sadducéens, des Juifs qui nient qu’il y a une résurrection des morts. Pour eux, c’est un bonheur terrestre que Dieu donne, et puis c’est tout.
Possédés par ce que nous possédons
homélie du 25e dimanche C, 18 septembre 2022
{joomplu:190} Nous sommes déroutés par cette parabole et ces réflexions de Jésus sur l’argent. À première vue, nous nous étions attendus à ce que le Seigneur nous invite à être bien honnêtes, à être le plus juste possible avec l’argent. Est-ce qu’il nous aurait par exemple dit qu’aller faire le plein en France en étant subsidié par les impôts payés par les Français, en tant que Belge ce n’était pas très équitable ? Peut-être… J’y pense parce que j’ai été tenté de le faire… Mais son propos est assez décalé par rapport à la question de l’équité. Un jour il avait renvoyé bredouille un homme qui venait lui demander son aide pour un juste partage d’héritage (Lc 12,13). Aujourd’hui, l’adjectif qu’il accole au mot « argent » c’est « malhonnête », ou « injuste », ou « méchant » — adikos. Et en fait, ce qui a été traduit par « argent », Jésus l’appelle « Mamon », et cela sonne comme un nom de divinité : l’argent fonctionne dans le cœur de l’homme comme une divinité à laquelle on se confie pour son avenir et pour sa vie. Alors il est toujours malhonnête, méchant, car il prend la place de Dieu et il prend la place du frère.
Le paradis, entre fiction et réalité
homélie du 21e dimanche C, 21 août 2022
{joomplu:200} Un homme vient demander à Jésus : Est-ce qu’il n’y aura que peu de gens qui seront sauvés ? Il y a 4 siècles, un courant spirituel appelé jansénisme avait répondu : oui, il y en aura peu. Sur les crucifix jansénistes, le Christ avait les bras très serrés sur le dessus de la tête, car il ne servait à rien qu’il ait les bras grand ouverts pour accueillir le peu de ceux qui seraient sauvés de la grande masse des réprouvés. De nos jours, à l’inverse, nous avons été endormis par une théologie à la Michel Polnareff, « on ira tous au paradis », une vision qui semble très positive, mais qui en réalité fait du paradis un enfer. Car de deux choses l’une. Ou bien le paradis consiste à vivre comme nous l’entendons, et alors vivre ainsi toute une éternité tournera au calvaire. Quand on peut vivre comme on veut pendant une semaine ou quinze jours, ça va, mais après commence l’ennui et le désir de fuir cette situation. Ce n’est pas pour rien que les jeunes retraités traversent une crise, alors qu’ils ont tant désiré ce moment où ils ne seraient plus contraints de rien. Quand je parle aux gens de l’éternité, beaucoup me disent craindre que ça risque d’être long. Ils ont raison : un paradis éternel où on vit comme on veut, ça sera un enfer. L’autre possibilité est que le paradis soit comme le dit la foi chrétienne : une vie d’amour, une contemplation de Dieu, l’auteur de tout bien et de toute beauté, lui qui est infiniment désirable, lui dont on ne se rassasiera jamais de goûter le visage, lui à qui l’éternité convient si bien car si on venait nous dire : « bientôt c’est fini », nous mourrions une deuxième fois d’être privés d’un si grand bien. Ce paradis a le bon contenu, mais si on est tous forcés d’y entrer, si on y va tous d’office, alors nous nous trouvons en présence d’un Dieu qui obligerait à l’aimer. Et ça, à nouveau, c’est l’enfer, car un amour obligé n’est plus de l’amour. Donc, c’est impossible de dire qu’on ira tous au paradis, et d’ailleurs on ne trouve cela nulle part dans l’Écriture.
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