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Dieu est esprit, et il peut nous rencontrer

homélie du 3ième dimanche de carême

« Si tu savais le don de Dieu », dit Jésus (Jn 4,10). Ah oui, si tu le savais, si tu en avais au moins une petite idée, si tu pouvais sentir en toi la soif de Dieu qui t’habite, si tu te rendais compte que la soif d’amour qui est dans ton cœur est une secrète soif de Dieu ! Jésus s’adresse à une femme qui a eu cinq maris. Autant dire qu’elle avait une grande soif de se sentir aimée. Notre soif d’être aimé ne se manifeste pas souvent ainsi, mais elle est réelle, et parfois elle nous tenaille et nous met hors de nous-mêmes, à moins qu’elle ne nous pousse à toute sorte de lamentation sur nous-mêmes.

A celui qui a une telle soif, Jésus ne vient pas en disant : je viens combler toutes tes attentes. Il vient en demandant : donne-moi à boire ! Accepte d’entrer en relation avec moi ! Alors seulement, même si le dialogue est un peu rude, Jésus promet l’eau vive, l’eau qui jaillit d’un cœur aimé et aimant, qui jaillit en vie éternelle.

Jésus ne dit pas encore davantage ce qu’est cette eau vive, mais il aide la femme à regarder l’état de sa vie, l’état de son cœur. C’est tout le dialogue à propos des maris. Une fois que la femme a accepté que Jésus regarde sa vie — et il le fait avec franchise et pudeur —, elle peut entendre la suite : l’eau vive est de Dieu, mais elle ne se puise pas sur le mont Garizim ou à Jérusalem. Elle se puise auprès du Père, car l’heure vient — c’est Jésus qui fait venir cette heure — « où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et vérité », ce qui veut dire que le lien que nous pouvons avoir avec le Père qui est esprit peut, par Jésus, devenir un lien vraiment vivant et passionnant. J’ai souvent pensé que Jésus proposait de faire un effort : fais un effort pour adorer le Père en esprit et en vérité ! Mais puisque Jésus parle d’une heure particulière qui doit rendre cela possible, c’est qu’il s’agit d’une disposition de Dieu plutôt qu’un effort de notre part. Par Jésus, par le don de l’Esprit Saint qu’il nous obtient, nous devenons capables de vivre de Dieu qui est esprit. Même si au point de départ nous pensions qu’une relation avec Dieu ne peut pas combler une soif d’aimer, car Dieu est tellement impalpable que nous l’éprouvons comme lointain, finalement il devient possible d’adorer Dieu qui est esprit en esprit et en vérité, de vivre cette relation avec le Père qu’on voit à l’œuvre chez Jésus et qui fait de lui un homme si complet, si épanoui, si accompli.

Je fais le souhait que pendant ce carême nous puissions faire la rencontre du Christ comme l’a vécue la femme de Samarie. Une rencontre où il mendie notre eau, notre amour, et où il se révèle à nous comme le Christ, celui que notre cœur attend, celui qui peut rendre vivante notre relation de chaque instant avec le Père. Alors, que ce soit sur le chemin du travail, de l’école ou des courses, au milieu de nos bureaux ou de nos maisons, nous pourrons adorer le Père en esprit et en vérité, penser à lui en l’aimant, lui rendre grâce pour le fait d’être son enfant, de respirer et de vivre. Une bonne eau vive jaillira de notre cœur.