homélie de l’ouverture de la neuvaine à Notre-Dame des Joyaux, Montœul-au-Bois, lundi de Pentecôte 2018

La première lecture{joomplu:168} nous a connectés au drame de l’humanité qui s’est éloignée de Dieu. Dans la personne d’Adam, c’est toute l’humanité qui se trouve mal à l’aise avec Dieu, qui le voit comme un accusateur, qui a peur de lui et cherche à se cacher de lui, à se dérober, à lui tourner le dos pour n’en faire qu’à sa tête. Quand l’homme fait cela, il cherche une solution à son mal en accusant les autres : c’est la femme que tu as mise à mes côtés ! C’est le serpent ! Aujourd’hui encore, l’homme insatisfait reporte la faute sur les autres. Nul ne pense à changer d’abord son cœur. Et c’est ainsi que commencent les rivalités, les trahisons, puis les guerres.

Mais Dieu n’a pas voulu abandonner l’humanité à ses refus, même si ce qu’on voit dans l’actualité pourrait nous le faire penser. En se révélant au peuple hébreu, en le préparant à accueillir la venue de son Fils, Dieu commençait à construire le chemin du retour à lui, qui est le retour à la vie, au bonheur de l’amour fidèle et fort. Déjà dans la première lecture nous entrevoyons l’issue heureuse de ce chemin, lorsque Dieu dit au serpent par qui le mal est entré dans le monde : c’est au talon que tu meurtriras la descendance de la femme, mais elle, elle te meurtrira à la tête (Gn 3,15).

Marie accompagne le chemin du retour à Dieu, qui est le chemin de l’Église, à la fois joyeux et douloureux. Il est joyeux parce qu’il mène à la vie, parce que c’est une grande espérance que de savoir que Dieu est un Père pour nous et qu’il nous aime tant. Il est douloureux car nous devons faire ce chemin dans la foi, sans voir, sans sentir, et que parfois nous sommes incompris et nous ne comprenons pas non plus ce qui arrive. Ne soyons pas étonnés si notre foi est un combat. Le chrétien est quelqu’un qui va à contre-courant. À contre-courant de la méfiance, de la tendance à reporter la faute sur les autres, de la convoitise, de la dureté, du découragement.

Le chrétien ne s’appuie pas seulement sur ce qui se voit, sinon son regard sur le monde ressemblerait à celui du journal télévisé. Mais il voit plus loin : il sait qu’il n’est pas seul, que le Christ a donné sa vie pour lui et pour ceux qui acceptent de se tourner vers lui ; il sait que les dons de Dieu ne sont pas quelque chose du passé mais du présent, et il connaît les puits où il peut puiser la grâce de Dieu, le don de son amour : ce sont les sacrements que porte l’Église — et ce matin vous êtes venus puiser à ce puits de l’amour de Dieu, dans cette eucharistie. Et le chrétien sait aussi qu’une douce présence l’accompagne dans toutes se démarches : c’est Marie, mère de l’Église. Elle est mère de l’Église parce qu’elle aide l’Église à naître à la vie de Dieu et qu’elle accompagne sa croissance.

Marie était présente au moment où tout a commencé. Elle était là à la croix, quand le monde basculait dans la haine au point de faire mourir le Fils de Dieu innocent. Elle était là avec Jean, le jeune disciple bouleversé, pour l’abriter dans son cœur de mère (Jn 19,26). Et 50 jours plus tard, au milieu des apôtres, quand on ne savait encore rien de comment cela allait se passer, quand on se demandait où allait mener la nouveauté que Dieu avait introduite dans le monde par la résurrection du Christ, Marie était là, toute unie à son Fils par la prière. Elle était là comme un repère de la présence de Dieu à ses enfants. C’est une expérience que j’ai souvent faite dans ma vie, dans les moments difficiles : lorsqu’on se tourne vers Marie elle vient dire à notre cœur : ne crains pas, Dieu est là ! Et alors on peut tenir dans la détresse et voir la lumière.

Marie présente à l’Église depuis le début peut nous aider encore aujourd’hui à avancer, malgré nos doutes ou ceux de notre entourage ou de notre société qui ne veut plus croire. Marie est à nos côtés lorsque nous sommes tristes de voir nos enfants, nos petits enfants s’éloigner de Dieu. Elle nous fait comprendre que notre prière pour eux n’est pas vaine, et que Dieu s’occupe des siens qui sont aussi les nôtres. L’Église aujourd’hui se sent toute petite, mais quand elle prend Marie comme mère, elle retrouve des forces et elle retrouve confiance.