Qui se souvient de sa date de naissance ? Et de sa date de baptême ? Pourtant, c’est un événement si grand, celui sur lequel repose toute notre vie chrétienne — et notre vie chrétienne ce n’est pas un petit côté de notre vie que nous sortons à l’occasion, c’est toute notre vie. Le baptême change tout, au point que saint Paul dit à son ami Tite que Dieu, « par le bain du baptême, nous a fait renaître. » (Tite 3,5)

Mais qu’est-ce que cela veut dire — pour nous — renaître ?

Avant ta naissance, déjà tu vivais dans le ventre de ta maman, tu étais un petit être qui exige respect et protection. Mais on ne te voyait pas encore, on attendait que tu vives enfin. Avant le baptême, nous vivons déjà et le simple fait d’exister est une bénédiction de Dieu. Mais Dieu attend que nous vivions davantage pour lui, que nous devenions vraiment ses enfants. C’est le baptême qui nous fait renaître à sa vie. Du point de vue de la vie avec Dieu le baptême change tout comme la naissance change tout du point de vue de la vie sur la terre.

Tu parles de la vie avec Dieu. Tantôt nous avons entendu parler de l’ « héritage de la vie éternelle ». Est-ce que c’est la même chose ? C’est quoi cette histoire d’héritage ?

Oui, on peut dire que c’est la même chose. Et on parle d’héritage car nous n’avons rien fait pour recevoir ce grand don, tout comme on n’a pas travaillé pour l’héritage qu’on reçoit de ses parents ou grande tante. Comme disait saint Paul, ce don est fait par amour, « non pas à cause d’actes méritoires que nous aurions accomplis par nous-mêmes ». Vous pourrez faire tout ce que vous voulez, vous ne mériterez pas plus l’amour de Dieu et la vie éternelle.

C’est un peu choquant d’entendre cela ; on n’a plus envie de faire des efforts pour faire le bien si Dieu n’en tient pas compte et donne sa vie à tous ! À quoi ça sert tous ces efforts pour être chrétien alors ?

C’est d’autant plus choquant qu’aujourd’hui cela demande pas mal d’efforts d’être chrétien au milieu de notre monde. Mais la logique de la foi chrétienne c’est celle-ci : je fais des efforts pour bien vivre parce que j’ai reçu ce don de la vie de Dieu — plutôt que : je fais des efforts pour recevoir la vie. D’abord je m’émerveille du don reçu : je suis sauvé, Dieu m’a fait renaître, je possède dans l’espérance l’héritage de la vie éternelle, etc. Et en conséquence je me dis : je dois changer ma vie, puisque j’ai tant reçu, je ne peux pas vivre comme un fils ingrat ou profiteur, c’est indigne de l’amour.

Moi, cette histoire d’ « être sauvé », du « salut de tous les hommes », ça ne me dit rien, je ne comprends pas...

Quand on parle de Jésus comme le Rédempteur ou le Sauveur, on a du mal de comprendre ce que ça désigne. De nos jours on connaît plutôt le mot de « sauveteur » ; Jésus est notre sauveteur. Et dans quoi est-ce que nous sommes en train de nous noyer ? Saint Paul dit dans « nos fautes » ; on pourrait traduire : dans tout ce qui nous coupe de Dieu, c’est la même chose. Chaque fois que je refuse d’aimer, que je me replie en moi-même, que je fais du mal aux autres, que j’oublie Dieu, que je ne prie plus, petit à petit la tristesse envahit mon cœur et je ne suis plus content de rien. Mais magiquement, quand j’ose aimer, en me sachant aimé de Dieu, en prenant le risque d’aimer, de sortir de moi, à cause de l’amour de Jésus pour moi, quand j’ose vivre selon l’évangile, alors j’échappe à la noyade, Jésus me sauve. C’est bon d’être attentif à nos états d’âme pour savoir en quoi Jésus doit être notre sauveteur.

Tu as parlé de la vie de Dieu comme si c’était la vie éternelle. Mais la vie éternelle, c’est dans longtemps ! Qu’est-ce que ça change pour nous aujourd’hui ?

Il y a une phrase de l’évangile qui va nous aider à comprendre comment la vie éternelle est déjà commencée — ça devrait être notre réflexe, chaque fois que nous entendons « vie éternelle », de nous dire en nous-mêmes « la vie éternelle est déjà commencée ». C’est ce que saint Paul suggère en utilisant le présent : nous possédons, dans l’espérance, l’héritage de la vie éternelle. Dans l’évangile, le Père dit à Jésus : « C’est toi mon Fils : moi, aujourd’hui, je t’ai engendré. » C’est aujourd’hui que commence la vie nouvelle. Dans mon cœur une autre vie est là, pour toujours, une vie d’amour, une vie très belle. Seigneur, même dans nos jours de ténèbres aide-nous à trouver le chemin de cette vie !