homélie de Pâques 2011

{joomplu:175} La résurrection de Jésus fut un événement bouleversant pour les apôtres, quelque chose à quoi ils ne s’attendaient vraiment pas. Ils avaient bien vu la résurrection de Lazare, mais cette fois c’était si différent : Jésus ne revient pas à l’ancienne vie, celui que les apôtres rencontrent vit d’une vie incomparable, la vie éternelle où il ne connaîtra plus la mort. Il faudra du temps aux apôtres pour la reconnaître. Au début, la joie des apôtres sera mêlée de crainte, ils prendront même le Seigneur pour un fantôme. 40 jours seront bien nécessaires pour comprendre la vie nouvelle de Jésus.

La résurrection n’est pas un retour en arrière, avant la croix, une restauration du passé. Vendredi nous avons uni à la croix les souffrances de nos vies. J’ai été très ému, lors du camp que je vivais avec une centaine de jeunes dans la région de Tournai, de les voir venir poser leur front sur la croix, demander au Seigneur de vivre avec lui les épreuves de leurs familles, de leur vie d’étudiant, de leur vie au milieu des condisciples ou des amis ; ils m’ont partagé des épreuves si profondes que je reste édifié de les voir marcher dans la foi et je bénis le Seigneur de les tenir.

Les croix de nos vies ne sont pas balayées à Pâques ; Dieu ne vient pas les volatiliser, ni les expliquer, mais il a ouvert un chemin au milieu de la souffrance et il veut l’ouvrir chaque jour pour nous.

Pour que cela se réalise, le témoignage de la résurrection ne peut pas nous venir comme un fait médiatique, un événement relaté au journal télévisé de 13h en direct du tombeau vide. Il ne peut que nous arriver par la foi, car la foi est le seul mode de connaissance vraiment transformant de notre réalité. Les événements relatés par les médias peuvent nous toucher, mais ils ne nous transforment pas au jour le jour.

Les récits de la résurrection nous paraissent un peu éclatés, ils ne concordent pas sur tous les points, montrant l’effet déroutant que l’événement a eu sur les apôtres : comment traduire dans un récit une expérience si unique ? Un journaliste serait bien malheureux. Seule la foi nous permet d’accéder à la résurrection. C’est heureux, car c’est ainsi que l’action de Dieu se déploie dans nos vies. Non pas à la manière d’un événement extérieur mais selon une transformation intérieure.

Dans la foi on peut distinguer un travail et un don. Un travail, d’abord, pour affirmer à notre cœur les réalités de la foi. La foi est un travail qui élargit les bases de notre cœur, pour le rendre plus stable au milieu des apparences ou des tempêtes de nos sentiments et de nos impressions. La foi est le grand travail de fondation et de transformation de notre vie.

Souvent la foi est considérée comme un mode de connaissance faible, sans cesse menacée par le doute. En réalité, le doute ne met pas la foi en péril — sauf le doute cynique, le doute de celui qui envisage d’avance de ne pas croire, ce doute si souvent distillé dans notre monde. Mais le doute fortifie plutôt la foi, donnant à notre volonté de choisir d’accueillir les réalités de la foi, donnant à cette connaissance de pénétrer profondément dans notre mentalité, dans notre conscience, par ce choix délibéré.

Par la foi nous plaçons volontairement notre vie dans l’atmosphère de Dieu, nous dépassons les apparences, les replis sur nous-mêmes, les soupçons, pour ouvrir à Dieu un champ d’action à l’intérieur de notre cœur. La foi est la réalité qui nous transforme à l’intérieur de nous-mêmes. Ce que je veux être rencontre ce que je veux connaître et s’y unit.

Face à la force des doutes, je dispose de la force du témoignage des apôtres et de l’Église. Les apôtres n’étaient pas des rêveurs, mais des gens bien terre à terre. L’événement de la résurrection les a marqués visiblement, au point qu’ils ont abandonné leur vie stable pour parcourir les routes en annonçant le Christ et sa puissance. Ils sont allés jusqu’à donner leur vie pour ce témoignage. Et tant de saints, tant de grandes pointures intellectuelles ou tout simplement humaines ont fait du Christ leur guide, me laissant penser qu’il est raisonnable de croire. Au-delà des impressions j’accueille une réalité dont me rendent témoignage l’expérience de mes pères dans la foi, conjuguée à la voix intérieure de ma conscience.

La foi est travail, et en même temps don de Dieu. C’est Dieu qui peut me donner de croire, et je dois lui demander souvent. Seigneur, augmente en nous la foi, fais-nous ce cadeau de Pâques !

Vous saisissez bien maintenant pourquoi il ne convenait pas que la résurrection du Christ soit accessible comme un fait journalistique, mais que seule la foi nous la fasse rencontrer. Au milieu de notre monde, soyons le peuple qui vit de foi, qui désire et accueille l’action de Dieu en lui et progresse dans la plénitude du don de Dieu !