homélie du Vendredi saint

{joomplu:92}Les enfants demandent souvent : pourquoi Jésus a-t-il été mis à mort ? Cette question vient tous nous réveiller.

C’est une injustice, une injustice éclatante. Alors nous nous demandons : qui sont ceux qui ont commis cette injustice ? Et là nous découvrons qu’il y en a beaucoup. Dimanche je vous parlais des chefs des prêtres, d’Hérode et de Pilate. Ce sont des décideurs, pour qui Jésus est subversif ou insignifiant. Mais aujourd’hui nous pourrions nous arrêter sur l’attitude des disciples et de la foule. Jésus a été mis à mort parce que dans ce monde très dur et violent il n’y a eu personne pour le défendre. Il y a les amis qui se sont cachés, et la masse des gens qui a suivi les interprétation des médias — pour faire une transposition moderne.

Plus tard, après la résurrection, les apôtres oseront défendre Jésus, témoigner de lui, annoncer l’évangile. Si cela s’était passé dans un monde purement humain on aurait pu dire : c’est bien malin de se réveiller maintenant ! Le mal est fait, Jésus est mort, il est trop tard... Mais nous sommes dans un monde habité par Dieu, et sa puissance de vie a englouti la mort. Il n’est pas trop tard pour se réveiller, pour accueillir l’Esprit Saint, pour laisser notre cœur vibrer à la Bonne Nouvelle.

Et si la mort de Jésus n’est pas la fin de l’espérance, c’est à cause de l’attitude de Jésus lui-même : il ne meurt pas dans la révolte, le cœur durci par l’injustice. Il meurt en donnant sa vie pour ceux qui l’éliminent. Il meurt en se faisant pont entre le Royaume du Père et les hommes opposés à ce Royaume. Et parce que Jésus meurt dans un grand geste d’amour, le mal est paralysé, la mort est détruite, envahie par la vie qui surgira demain.

Ce qui arrive à Jésus nous pousse à être solidaires de tous ceux qui portent une croix aujourd’hui. Être solidaires des malades, des personnes rejetées ou persécutées. Être solidaires aussi de tous ceux qui souffrent de la dureté de la société. Je pense à ceux qui perdent leur emploi et à ceux qui ne parviennent pas à en trouver un. Je pense spécialement en ces jours à ces mamans qui portent une lourde croix à cause du drame de l’avortement. Dimanche passé une marche a réuni plus d’un millier de personne pour défendre la vie. Il faut que cela se passe dans le sens d’une espérance, que cela nous pousse à créer des conditions où la vie sera davantage perçue comme un don inouï et une bénédiction plutôt qu’un problème. C’est une très grande pauvreté, pour une mère, de vivre dans un monde où un bébé n’est plus reconnu comme un être humain. Comment aider les personnes à ne pas commettre une injustice, nous qui sommes les disciples de quelqu’un qui a été mis à mort injustement ? Ce qui est en jeu est la question de la solidarité. Solidarité avec les couples qui deviennent parents d’une façon qu’ils n’ont pas voulu. Solidarité avec ceux qui n’ont pas d’emploi. Solidarité dans notre accueil des sans-papier, solidarité dans notre façon de prendre distance avec la consommation, solidarité dans notre façon d’investir notre argent, solidarité dans la recherche d’information sur la vie des peuples du monde. Nous ne pouvons pas devenir des chrétiens bien pensant mais nous engager plutôt dans une solidarité concrète avec tous ceux qui sont précarisés.

Il arrive que la complexité des situations personnelles ou internationales nous paralyse et épuise notre désir d’engagement. Que l’Esprit Saint nous aide à nous rendre compte combien le Christ se tient à nos côtés lorsque nous nous sentons dans l’impasse. Il a connu l’angoisse de la mort pour que nous ne soyons plus jamais seuls ni résignés. En découvrant le parcours de la vie de Jésus nous nous laissons persuader qu’il est raisonnable de choisir la vie et l’amour, même dans des situations où d’autres diraient que nous sommes fous.