homélie du 3ème dimanche de l’Avent (Is 35,1-10 ; Jc 5,7-10 ; Mt 11,2-11)

Comme il est interpellant, Jean-Baptiste dans sa prison ! Il a consacré toute sa vie à préparer les chemins du Seigneur, il y a mis toute son énergie, toute sa passion, il a même vu venir à lui celui qu’une voix du ciel a désigné comme son fils bien-aimé et sur qui l’Esprit a reposé. Maintenant il se trouve en prison, pour avoir dit à Hérode : « tu n’as pas le droit de prendre la femme de ton frère » (Mc 6,18). De sa prison, l’action de Jésus l’étonne et le met dans le désarroi ; est-il celui qui doit venir, celui qui agit si différemment de ce qu’il attendait ? Celui qui agit par la douceur, la persuasion, plutôt que par une puissance éclatante ?

Jésus lui répond : il est celui qui doit venir, mais c’est à Jean-Baptiste de le comprendre, par cette référence à la promesse des prophètes, comme si Jésus disait : « regarde, c’est maintenant ! »

Dieu agit, il est présent, il n’est pas indifférent ni impuissant. Quelle source de joie de le découvrir ! J’avais 21 ans quand cela m’est devenu clair. Jusqu’alors, malgré tout le parcours déjà fait dans l’Église de Dieu, j’avais déjà compris que Dieu comptait, qu’il pouvait me guider, que l’évangile était une référence, une source d’inspiration, mais je n’avais pas encore découvert que Dieu agissait concrètement dans ma propre vie. Cette découverte de la présence réelle de Dieu à mes côtés, de son amour actif pour moi, a été la source d’une joie qui ne s’est jamais tarie.

Nous avons des réticences avec cette idée de l’action concrète de Dieu ; si Dieu agit, pourquoi tant de situations de détresse ? Ne sont-elles pas la preuve que Dieu ne peut agir, qu’il a les bras trop court ? Je n’ai pas de réponse, mais je constate : une fois qu’on accueille l’idée que Dieu peut agir dans nos vies, on le voit agir et cela nous remplit de joie ; la parole des prophètes devient réalité : « Non, le Seigneur n’a pas le bras trop court pour sauver, il n’a pas l’oreille trop dure pour entendre. » (Is 59,1)

Ce n’est pas une constatation physique, la découverte d’une causalité évidente entre Dieu et tel changement dans ma vie ; mais une conviction de foi, qui naît dans notre cœur comme dans celui de Jean-Baptiste. Le fait qu’il y ait plein de détresses que je ne m’explique pas ne doit pas me faire bouder l’amour de Dieu, l’enfermer dans des limites prédéfinies. « Goûtez et voyez comme est bon le Seigneur ! » (Ps 34,9) Demandez lui de voir tel désert de votre vie se mettre à fleurir !

Bien sûr nous nous disons : mais ce n’est pas comme dans l’évangile, je ne suis pas aveugle, je ne suis pas lépreux, je ne suis pas mort ! Et pourtant, regardons ces ténèbres en nous qui nous font « gémir les uns contre les autres » (Jc 5,9) comme disait l’apôtre Jacques ; nous avons vraiment besoin d’un sauveur pour vivre en frères et sœurs et interpeller le monde par notre façon de nous aimer !

Dieu veut donner la joie à ses enfants. Jean-Baptiste ne pourra pas s’échapper de sa prison, mais la joie du Royaume va l’atteindre, il « bondira comme un cerf... » (Is 35,6) Dieu veut nous donner une telle joie. Il vient, il a ses manières, et cela nous intrigue : es-tu vraiment celui qui peut combler notre cœur, as-tu raison de te présenter comme un sauveur ?

Nous pouvons nous risquer peu, ou répondre avidement oui. Ce n’est pas indifférent, c’est la mesure de notre joie.