homélie du jour de Pâques

{joomplu:1}Aujourd’hui je dirai un mot sur chacune des lectures. Dans les Actes des Apôtres nous constatons ce curieux rapprochement entre « juger » et “donner le pardon”. Pierre peut à la fois dire de Jésus que « Dieu l’a choisi comme Juge des vivants et des morts » et que « tout homme qui croit en lui reçoit par lui le pardon de ses péchés » (Ac 10,42-43). Juger et pardonner sont deux notions qui dans la culture contemporaine s’opposent, mais qui communiquent l’une avec l’autre dans la Bible. Ce n’est pas « ou bien Dieu me juge ou bien il me pardonne » mais plutôt qu’il me pardonne parce qu’il peut me juger, parce qu’il discerne en moi ce qui doit être pardonné — et que je l’accepte aussi. Dans la Bible le jugement n’exclut pas, il ne condamne pas mais il est destiné à justifier, c’est-à-dire à purifier. Le jugement est comme une disqualification du mal, qui ouvre celui qui l’accepte à un avenir.

Cette acceptation, c’est la foi dont parle Pierre. C’est la foi qui fait passer du jugement au pardon, parce que la foi est accueil du Christ qui seul peut purifier nos êtres. Que le Seigneur nous aide à comprendre à quelle profondeur il désire nous restaurer !

 

Dans l’Évangile je voudrais m’attarder au rôle de Simon Pierre. Simon Pierre, c’est celui qui à Gethsemani reçoit les reproches de Jésus au nom de tous : « Simon, tu dors ! Tu n’as pas eu la force de veiller une heure ? » (Mc 14,37) Maintenant c’est lui qui entre au tombeau après Pierre mais valide la constatation qu’il est vide (Jn 20,4-7). Dans ces épisodes nous pressentons quelque chose de la responsabilité et de la mission de l’Église hiérarchique. Celle-ci n’est pas seulement un mal nécessaire mais une aide pour jalonner notre chemin de foi à tous. Parce qu’elle rappelle les données fondamentales de la foi elle permet à tous d’avancer. Ce n’est pas elle qui court le plus vite, qui croit d’emblée, qui fait preuve de la sensibilité mystique la plus délicate… Ce n’est pas son rôle. Mais elle constate l’œuvre de Dieu, elle permet de s’appuyer efficacement sur la foi en la résurrection, si souvent malmenée en nous et autour de nous.

 

Enfin la lettre de saint Paul aux Colossiens. Saint Paul nous affirme : « vous êtes morts avec le Christ, et votre vie reste cachée avec lui en Dieu. » (Col 3,3)

Nous pouvons nous demander ce qu’est cette vie cachée. Le petit Paul qui va être baptisé va être introduit par son baptême dans cette vie. Le baptême n’est pas qu’un rite d’appartenance, une proclamation de nos valeurs communes, il est une action de Dieu, celle de nous faire passer avec le Christ de la mort à la vie. On se dira : ce petit enfant est déjà bien vivant, comment passe-t-il de la mort à la vie ? Il y passe en recevant une vie nouvelle, une vie cachée en Dieu mais bien réelle, qui n’attend que de se déployer en lui jour après jour au fil de l’éducation de ses parents et de ses choix personnels.

Cette vie spirituelle est cachée et c’est un défi très spécial pour nous qui vivons dans un monde fasciné par ce qui est immédiat. Dans les sociétés rurales l’homme est moins exposé à tant de sollicitations captivantes ; il peut plus facilement laisser se développer en lui cette vie fragile et discrète. La contemplation suscitée par le silence et la proximité de la Création ouvrent sur ce monde intérieur.

Quant à nous, ne nous étonnons pas que vivre réellement de cette vie cachée en Dieu soit un combat de tout les jours. Rien ne nous rappelle à Dieu naturellement, tout nous attire loin du silence nécessaire pour vivre de l’Esprit. Ce n’est que par un rappel constant que nous nous tenons les uns les autres ouverts à ce que Dieu veut nous donner au plus intime. Que la force de la résurrection nous empêche de nous décourager sur ce chemin de foi !