homélie du baptême du Seigneur

Tous les hommes ont besoin d’amour. Lorsqu’on se sent aimé, on est content, on devient généreux et capable d’aimer à notre tour. La vie est belle, et même s’il pleut il y a du soleil à l’intérieur. Tous les hommes ont besoin d’amour et ceux qui ne semblent pas en avoir besoin, ils sont ainsi parce qu’ils se sont blindés en eux-mêmes, parce qu’ils ont tant souffert de manquer d’amour qu’ils ont essayé de se construire à côté de leur besoin d’amour. Mais ce besoin est là quand-même, et il crie. Et il cherche sans le dire à rencontrer un vrai amour.

C’est ainsi parce que nous sommes à l’image de Dieu. C’est beau, mais dans ce monde notre besoin d’amour est si rarement comblé. Qu’allons-nous faire ? Gémir ? Essayer de nous distraire comme nous pouvons ? Ou de devenir puissant ou riche pour compenser ? Ou bien nous pouvons accepter un amour qui se propose à la porte de notre cœur, un vrai amour puissant et efficace, un amour qui se trouve quand on le cherche  : l’amour de Dieu !

Qu’est-ce qui s’est passé à Noël ? Qu’est-ce qui se passe aujourd’hui dans cet épisode du baptême de Jésus ? Il y a là la plus grande preuve possible de l’amour de Dieu, une preuve telle que nous devrions en jubiler chaque heure de notre vie. Pourquoi donc ? Prenons une comparaison. Imaginez que le peuple des fourmis soit dans les difficultés, que les fourmis se tirent dans les pattes, se dévorent entre elles, etc. Et imaginez que l’un de nous dise  : je veux bien me faire fourmi pour sauver les fourmis, devenir fourmi pas seulement pour un quart d’heure ou une demi-journée, pas seulement un petit peu pour voir ce que cela fait, mais pour toute ma vie, en supportant les difficultés d’une vie de fourmi, et j’accepte aussi de mourir comme fourmi, et d’endurer tout ce que les fourmis me feront si elles ne veulent pas de moi. Qui serait prêt à dire cela pour le peuple des fourmis ? Personne n’est-ce pas ? Eh bien c’est ce qu’a dit le fils de Dieu pour nous  : je veux bien quitter ma condition divine pour devenir homme, pour être homme parmi les hommes. Et Dieu se fait chair, « s’incarne », comme on dit.

Parfois nous pouvons nous demander si Dieu nous aime, parce que nous ne le sentons pas, parce que nous ne voyons pas non plus que tout marche bien dans notre vie. Il y a une réponse, une réponse objective, une réponse certaine  : Dieu m’aime fort puisque le fils de Dieu s’est fait homme pour moi, et qu’il a vécu pour moi toute la vie d’un homme, avec les peines les plus grandes.

Cet amour objectif de Dieu peut rester théorique pour nous si nous ne faisons pas l’effort de le réaliser. C’est que c’est un amour qui s’accueille. Nous pouvons nous réjouir de l’amour de Dieu, ou bien dire  : bof, qu’est-ce que ça change ? Mais si nous voulons nous en réjouir, c’est possible. La prière nous donne accès à cet amour, car prier c’est penser à Dieu en l’aimant. Si je m’arrête 10 minutes ou une demi-heure, pour penser à Dieu en l’aimant, alors mes récepteurs à l’amour de Dieu vont s’ouvrir et je vais tressaillir de joie, je vais respirer cet amour par le plus profond de moi-même.

Une chose encore pourrait me faire douter de pouvoir vivre cela  : que je me dise que je ne suis pas digne. Mais c’est pour me rendre digne que le fils de Dieu est descendu au Jourdain recevoir de Jean le Baptiste le baptême pour la conversion des péchés. Lui n’avait pas besoin de conversion des péchés, mais pour moi le canal de l’amour de Dieu était bouché par mes péchés. C’est lui, Jésus, Dieu fait homme, qui vient rétablir ce lien, qui le réhabilite, qui me permet d’en vivre.

Lui, Jésus, va se livrer pour nous dans cette messe. Accueillons cette preuve d’amour de Dieu, pour en être heureux et pour devenir capable de donner beaucoup d’amour, fidèlement, imperturbablement.