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de quoi nous sauve-t-il ?

homélie de Noël

Quand saint François organise la fête de la Nativité à Greccio, il veut rapprocher les gens de ce qui s’est passé à la naissance du Christ, pour qu’ils puissent en profiter, être réconfortés. Nous aussi, soyons joyeux de ce qui se passe.

Quand l’ange annonce l’origine de Jésus à Joseph — au moment où celui-ci ne sait qu’une chose : cet enfant n’est pas de lui — il déclare qu’il l’appellera Jésus, ce qui veut dire « le Seigneur sauve », car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés (Mt 1,21). Voilà le grand sujet de la joie d’aujourd’hui, celui que les anges annoncent aux bergers : un Sauveur nous est donné.

« C’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés »... Pour comprendre la joie qu’annoncent les anges, rappelons-nous quelle allégresse en nous quand nous nous sentons aimés tout entiers, accueillis non pas sous condition mais tout entiers, avec même ce qui nous fâche, ce qui nous répugne en nous. Dire que nous sommes tant aimés ! Voilà la joie d’aujourd’hui.

Les gens au temps de Jésus attendaient une autre sorte de sauveur, comme nous aussi bien souvent : un sauveur qui donne un gouvernement, un pouvoir d’achat, un GPS, un voyage ou un autre paradis terrestre. Mais il y a encore plus de joie à être sauvé de ses péchés. Pourquoi ? Qu’est-ce que c’est, au juste, un péché ? On le confond souvent avec la faute. Mais faire une faute, une erreur, un écart, ce n’est pas encore un péché. Le péché, c’est quelque chose de relationnel, c’est lorsqu’on tient compte du fait que cette faute blesse Dieu, abîme notre relation avec lui. Le péché, c’est la faute lorsqu’elle nous replie sur nous-mêmes, dans l’autojustification, dans la solitude et la peur de Dieu. Nous en voyons des signes lorsque nous commençons à nous rejetter nous-mêmes, lorsque le découragement s’installe durablement dans notre vie, lorsque nous nous disons que finalement le monde n’est pas si beau. Voilà autant de signes que nous avons perdu le contact avec notre Créateur. Notre faute devient refus de quelqu’un, rupture avec quelqu’un : notre Dieu. Au bout du compte, nous acceptons tout juste que Dieu soit une vague force ou un organisateur, non plus quelqu’un qui nous aime et que nous pouvons aimer.

Mais le salut est aussi dans cette relation avec celui qui a été refusé. À Noël nous découvrons toute la tendresse de notre Dieu. Celui qui sauve son peuple de ses péchés vient comme un petit enfant. Il sauve en rendant à nouveau possible la relation avec celui qui nourrit notre cœur, celui qui est notre joie de vivre. Il supprime le poids de nos fautes, non pas que nos fautes ne seraient désormais plus graves, mais son amour est plus grand, et nous sommes pris dans un mouvement de vie et d’amour qui dépasse tout cela.

Souvent nous nous sentons aimés sous condition : à condition d’être raisonnable, d’être bon, d’être compréhensif, à condition d’être sage, d’être performant, d’être séduisant... Ici, quelle lumière pour nous d’être aimés sans condition ! Jésus vient sans faire de reproches et sans poser de conditions : il vient, il est là, il demande seulement qu’on l’aime.