homélie du 4e dimanche de carême, année A, 19 mars 2023
{joomplu:178} Jésus accomplit une œuvre de lumière, l’œuvre de lumière par excellence : il rend la vue à un aveugle de naissance. Devant cela, les pharisiens se divisent. Certains reconnaissent l’œuvre de Dieu, « Comment un homme pécheur peut-il accomplir des signes pareils ? » D’autres estiment que Jésus a violé le repos du sabbat et donc ne peut pas être homme de Dieu. Ces derniers ont-ils une conception trop étroite ? Ont-ils besoin d’avoir une conception plus laxiste du sabbat pour admettre qu’on peut prendre ses libertés avec l’interdiction de faire aucun ouvrage ? Nous ferions fausse route en regardant les choses ainsi. Jésus ne s’est jamais présenté comme un maître qui prend ses libertés par rapport à la Loi. Mais il est un maître qui lui redonne tout son sens, qui l’accomplit. Il est maître du sabbat parce qu’il en est l’auteur, pas parce qu’il accommode la loi à ses priorités personnelles.
S’ils avaient compris que le sabbat est le jour de Dieu, le jour pour le Seigneur, les pharisiens adversaires pourraient se réjouir de cette victoire de Dieu sur les ténèbres, sur le découragement qu’instille le malin dans nos vies. Ou au moins admettre qu’ils ne comprennent pas, qu’ils sont aveugles. Mais ils disent « nous voyons » et considèrent les autres, ceux qui reconnaissent l’action du Christ, comme des moins que rien.
Jésus avait dit qu’il était la lumière du monde, qui fait refluer les ténèbres et permet d’accomplir les œuvres de Dieu. De cela, les pharisiens n’ont rien à faire. Est-ce que cela arrive encore de nos jours ? Bien sûr, dans le monde étranger à la foi ou hostile à Dieu, on n’admettra pas que Jésus peut agir encore de la sorte, ni même qu’il ait un jour agi comme cela. Mais même dans le monde chrétien, c’est loin d’être répandu que Jésus peut agir dans une vie et lui ouvrir des perspectives insoupçonnées. On entend beaucoup de propositions de réforme de la morale de l’Église qui consiste plutôt à adapter l’appel de Dieu à nos limites que de croire que le Seigneur peut patiemment les repousser. Trop souvent, au lieu de dire : « crois que le Seigneur peut t’aider à changer, à te convertir », on dit : « attends que nous parvenions à changer ce qu’on a toujours cru que le Seigneur te demande… » « Bientôt l’Église appellera bon ce qui a été dit mauvais jusqu’ici ». Et pourtant, dans l’Évangile, il y a tant d’exemple de la façon dont le Seigneur change une vie, en dépassant ce qu’on croyait possible.
Quand les pharisiens aimeraient un peu moins de lumière de la part du Seigneur, afin de rester centrés sur leurs conceptions humaines déguisées en piété, les petits et les pauvres désirent toujours plus de lumière pour réconforter leur vie. Aux pharisiens qui lui ordonnent « Rends gloire à Dieu ! Nous savons, nous que cet homme est un pécheur », l’aveugle répond : « Jamais encore on n’avait entendu dire que quelqu’un ait ouvert les yeux à un aveugle de naissance. Si lui n’était pas de Dieu, il ne pourrait rien faire ». Je fais le souhait que l’Église avance davantage dans cette voie qui consiste à affirmer que Dieu agit aujourd’hui dans nos vies, qu’il peut sauver ce qui paraît perdu, qu’il permet une espérance nouvelle. Nous ne sommes pas condamnés à ce qui paraît humainement possible. Bien sûr, « qui fait l’ange fait la bête » disait déjà Pascal. Il ne s’agit pas d’annoncer un évangile irréaliste, une conversion facile, magique, et finalement superficielle. Mais d’entendre à nouveau le Seigneur nous dire : « crois-tu au Fils de l’homme ? » Et aussi : « si tu savais le don de Dieu et qui est celui qui te demande à boire, c’est toi qui lui demanderais de l’eau vive ».Oui, le Christ appelle aujourd’hui des ténèbres à la lumière, et cette lumière vient de son cœur. Cherchons-le et conduisons-y ceux qui nous entourent. Seigneur, fais de nos paroisses des communautés missionnaires !