Homélie du 3e dimanche de l’Avent, 15 décembre 2024

Nous nous posons parfois la question du salut de ceux qui ne sont pas chrétiens. Si le Christ donne la vie éternelle à ceux qui s’attachent à lui, si, comme disent l’Évangile et les épîtres des apôtres, ceux qui le rejettent sciemment sont déjà jugés, qu’en sera-t-il de ceux qui ne l’ont jamais connu, ou qui n’ont connu de lui qu’une caricature, ou qui ont été découragés par le contre-témoignage de certains qui se disent chrétiens mais ne le sont pas de cœur ? La façon dont le salut commence d’entrer dans le monde avec la prédication de Jean le Baptiste nous donne quelques repères.

À ceux qui, venant à lui, demandent « que devons-nous faire ? », Jean donne des critères pour bien agir : partager ce qu’on a avec ceux qui n’ont rien, observer l’intégrité en matière d’argent, refuser la violence et le mensonge, etc. Plus tard, lorsque les théologiens chercheront à donner forme à cette façon d’agir, ils diront : il s’agit de suivre sa conscience, qui indique à chacun d’éviter le mal et de faire le bien, selon la formule du psaume 36.

Cette conscience est un don de Dieu à chaque homme, croyant ou non. Elle fait partie du propre de l’homme, qui est capable de prendre du recul par rapport à ses désirs et de s’interroger sur la qualité de ses actions. C’est une faculté de l’intelligence, un pouvoir de réfléchir à ses actions, pas pour peser ce qu’elles vont nous rapporter, mais pour comprendre si elles sont bonnes ou mauvaises en elles-mêmes.

Il y a bien sûr une caricature de l’action selon sa conscience, lorsqu’on invoque la liberté de suivre sa conscience pour maquiller la vraie motivation qui est d’agir selon sa volonté propre, ses envies, ses aspirations. N’en faire qu’à sa tête, ce n’est pas agir selon sa conscience. Au contraire, la conscience droite est capable aussi de nous indiquer le bien à faire ou le mal à éviter dans des situations où cela va nous coûter de suivre notre conscience. Il y a des héros de la conscience, qui ont préféré mettre en péril leur situation, une perspective d’avancement, et même parfois jusqu’à leur vie, pour suivre les indications de leur conscience, refuser ce qu’elle montrait comme mal, faire ce qu’elle déclarait bon.

L’enseignement de l’Église dit qu’il peut être sauvé, l’homme qui, ne connaissant pas Dieu sans que ce soit de sa faute, suit les indications de sa conscience. C’est ce que les papes ont appelé les « hommes de bonne volonté ». La façon dont Jean-Baptiste traite les publicains et les soldats qui viennent à lui nous encourage à penser ainsi. Quand le Sauveur vient dans le monde, tous les hommes sont aimantés vers sa puissance divine et le salut entre dans leur vie par les fenêtres de leur conscience.

Bien sûr, on ne peut pas en dire autant de ceux qui ferment les rideaux de leur conscience, qui s’isolent dans leurs façons confortables de penser et prétendent légèrement qu’il n’y a pas de Dieu à écouter parce qu’en fait cela leur coûterait trop de l’écouter. Tandis que le croyant se réjouit d’entendre que « le Seigneur est proche » (Ph 4,5), celui qui s’est isolé volontairement de Dieu s’en moque bien, jusqu’au jour où il le verra quand même. Sans être rassurés sur leur sort, confions-les au rayonnement puissant de l’amour de Dieu, qui, espérons-le, pourra les purifier sans les brûler.

Et nous, si parfois nous sommes découragés de nous-mêmes ou des difficultés de la vie, allons à Jésus, plongeons dans son cœur, laissons-le nous revêtir de sa joie, car il nous aime tant qu’il est venu à nous. Poussons des cris de joie, le Seigneur nous renouvelle par son amour ! (Sophonie 3,18)