homélie du 20e dimanche C, 17 août 2025
Si Dieu existe et s’il est bon pour nous, pourquoi la guerre, entre les peuples et dans nos familles ? Beaucoup se posent cette question, et aujourd’hui nous découvrons que Dieu n’a pas apporté une réponse théorique au problème du mal, mais qu’il l’a pris à bras-le-corps.
Nous avons retrouvé Jérémie au milieu de la boue. Lui le prophète courageux qui voudrait dissuader son peuple de mettre sa confiance dans de fausses sécurités. Les dirigeants ne veulent pas de sa parole, et il ne doit son salut temporairement qu’à la droiture de cœur d’un étranger, Ébed-Mélek l’Éthiopien. Si souvent, de nos jours encore, celui qui veut construire la paix et la justice est victime de ceux qui ont d’autres intérêts et semblent plus puissants que lui.
Dieu va-t-il se contenter de cette domination du fort, de l’arrogant, du manipulateur, de l’injuste ? Il n’a pas voulu s’arrêter là. Par la bouche de Jérémie il avait dit : « Je mettrai ma Loi au plus profond d’eux-mêmes ; je l’inscrirai sur leur cœur. Je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple » (Jr 31,33). Le temps passe, et voilà que, quelques siècles plus tard, paraît le Christ Jésus, le Fils de Dieu. Comment va-t-il s’y prendre pour inscrire au fond des cœurs la loi d’amour et de justice ? Si nous devions lui donner des conseils, nous lui dirions : vas-y, fais mourir les pécheurs, ou bien empêche-les de faire le mal : en quelque sorte, enlève-leur leur liberté afin qu’ils ne puissent plus qu’agir selon le bien. Bref, fais-en des marionnettes, si tu ne veux pas les détruire ! Je caricature à peine : c’est à peu près la façon dont nous estimons que Dieu devrait arrêter les guerres.
Mais Dieu veut sauver des libertés qui se perdent, nos libertés qui se perdent. Il ne peut pas les sauver en les détruisant. Dieu s’adresse à la liberté de chacun. Il nous dit : que fais-tu de ta liberté ? Et lui, de son côté, c’est de l’intérieur de notre être, par la persuasion de l’amour, qu’il entreprend de nous sauver. Cela lui coûtera beaucoup ; cela lui coûtera la vie, crucifié sur la croix par nos mains. Mais par sa façon de mourir, en nous aimant quand même, il va détruire la mort. Les premiers disciples le voient ressuscité, ils le touchent, puis ils l’annoncent. Le feu d’amour que le Christ est venu allumer sur la terre va prendre, quelles que soient les tentatives que l’on ferra pour l’éteindre. À travers les siècles, l’Église, en dépit des péchés de ses membres, continue cette mission de propager le feu de l’amour parmi tous les peuples et dans toutes les couches de la société.
Ce feu de l’amour va prendre parce que le Christ accepte d’être baptisé d’un baptême coûteux, un baptême angoissant, dit-il : le baptême de sa mort sur la croix par amour pour nous. Lorsque le Christ veut agir par la persuasion, ceux qui s’opposent à lui croient pouvoir l’écarter facilement. Mais par sa façon de mourir, lui le seul qui ne devait pas mourir, il remporte la victoire définitive sur le mal.
Où est cette victoire ? N’est-ce pas une illusion de prétendre que le mal est vaincu ? Nous avons un indice que cette victoire est réelle dans le fait que les disciples du Christ sont combattus et persécutés dans de nombreuses parties de la Terre, et même chez nous ils osent souvent peu exprimer des divergences avec la pensée dominante. Les statistiques mondiales disent que les chrétiens sont les croyants les plus persécutés, bien que des minorités le sont aussi dans différents pays. Cette situation a été annoncée par le Seigneur ; elle est bien le signe que le mal est déstabilisé par la foi chrétienne et qu’il veut la repousser. Voilà que la haine est vaincue par l’amour, l’indécence par la pureté, l’injustice par le don de soi.
Que l’Esprit Saint fortifie la foi dans nos cœurs ! Nous recevons de lui le pouvoir de mettre la lumière dans les ténèbres, et nous pouvons offrir le pardon au milieu des cœurs blessés. Attachons-nous de plus en plus à vivre selon l’Évangile ! C’est un grand honneur. Un auteur chrétien des années 190 disait dans sa lettre à Diognète : « les chrétiens sont comme détenus dans la prison du monde, mais c’est eux qui maintiennent le monde… Persécutés, ils se multiplient de jour en jour. Le poste que Dieu leur a fixé est si beau qu’il ne leur est pas permis de le déserter. » (Lettre à Diognète, № 6)