homélie du 21e dimanche A, 27 août 2017
Aujourd’hui{joomplu:159} Dieu nous propose de recevoir un vrai chef qui nous conduira dans la lumière du Seigneur, qui sera un père pour nous. C’est ce qu’il voulait pour son peuple à l’époque d’Isaïe (Is 22,21). C’est ce que le Christ veut en donnant une structure hiérarchique à son Église, en disant à Pierre — qu’il avait lui-même nommé ainsi (Mc 3,16 ; Jn 1,42) : sur cette pierre que tu es, je bâtirai mon Église. Comme il lui dira aussi à l’heure de sa passion : « quand tu seras revenu, affermis tes frères » (Lc 22,32). Et après la résurrection : « sois le berger de mes brebis » (Jn 21,16).
Est-ce que nous aspirons à vivre sous la conduite d’un pasteur au nom de Dieu ? Habitude culturelle de suspicion envers celui qui a l’autorité, qui empêche d’accueillir, mais aussi d’être franc, de dire simplement ce qui ne va pas. Alors on va se contenter de dire du mal du pape, ou de son évêque, ou de son curé. Aujourd’hui le pape est populaire. Le pape précédent l’était moins. Sauf pour certains chrétiens où c’est l’inverse. De toute façon, j’observe cette tendance à accueillir un enseignement du pape dans la mesure où il nous plaît, sans aller beaucoup plus loin.
Est-ce puéril d’écouter le pape parce que c’est le pape et pas seulement parce que son enseignement nous plaît ? Écouter le pape parce que c’est le pape, même lorsqu’il nous dit des choses déplaisantes, c’est le signe qu’on veut accueillir le berger que Dieu nous donne, et que par lui on veut se laisser conduire par le Père lui-même, le Père qui révélait à Pierre l’identité de Jésus. Beaucoup se comportent envers Dieu comme des enfants gâtés, qui disent : je ferai ce que tu me dis si ça m’intéresse. Mais Dieu attend de vrais enfants, ceux qui disent : Père, je le ferai parce que tu me l’as demandé, parce que je t’aime et que je sais que tu m’aimes.
Il reste que Dieu prend un risque énorme en passant par des intermédiaires humains. Car si Pierre peut être la pierre sur laquelle Jésus bâtit son Église, c’est parce qu’il se laisse enseigner non par « la chair et le sang » mais par le Père du Ciel. L’histoire de l’Église est remplie de bons bergers, mais aussi de mauvais bergers qui ont exploité les brebis qui leur étaient confiées par le Seigneur. Pourtant, Jésus avait promis : la puissance de la mort ne l’emportera pas sur l’Église (Mt 16,18). Nous vivons avec 2000 ans de recul par rapport à l’époque de cette initiative de Jésus, et l’histoire de l’Église nous encourage aussi à accueillir sa décision, car même les papes corrompus, s’ils ont pris des décisions politiques ou disciplinaires discutables, n’ont pas altéré le dépôt de la foi.
Plus encore, rappelons-nous que l’Église n’est pas une ONG ou un parti. Elle existe pour unir au Père par le Fils. Et Dieu se révèle à travers la foi. La foi de celui qui doit être père et berger. La foi aussi de celui qui se laisse conduire dans la confiance et reconnaît le berger donné par Dieu malgré ses faiblesses. Cet exercice de foi n’est pas facile, mais c’est celui qui fait grandir les deux. Comme disait un jour un vieux religieux dans la tourmente de décisions absurdes de son évêque : par mon obéissance, j’obligerai Dieu. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas interpeller le berger, au contraire, car une interaction loyale est aussi un don de Dieu. On le fera à cause de notre Père du ciel1.
1Dans un autre passage de l’Évangile, Jésus avait averti ses apôtres de ne pas se faire appeler père en détournant de Dieu, mais de tout référer au Père du ciel, avec la même passion que la sienne (Mt 23,9). Ce n’était pas une façon de saper l’autorité, mais d’éviter les détournements. Si quelqu’un appelle un prêtre « père », que ce soit une façon de stimuler notre obéissance commune au Père du ciel.