homélie du 25e dimanche B, 22 septembre 2024

Dans le christianisme, Dieu montre un visage de miséricorde envers tous les pécheurs. Hier, nous fêtions saint Matthieu et nous nous rappelions avec joie que même un publicain a reçu sa place parmi les Douze, ceux qu’on appelle apôtres c’est-à-dire ceux qui sont les représentants directs du Christ auprès de ceux à qui il les envoie. Ainsi, un pécheur notoire devient représentant du Christ, quelle révolution ! Cette révolution, nous pourrions penser qu’elle repose sur un simple changement de conception : avant on pensait que Dieu était terrible avec le pécheur, maintenant nous découvrons qu’il n’est pas comme cela, mais qu’il est tendre et plein de pitié même pour l’homme qui s’égare. Le pécheur serait sauvé parce qu’il apprend qu’il n’est pas si loin de Dieu finalement. Or, présenter le salut ainsi, c’est se tromper lourdement sur la mission du Christ.

Jésus n’est pas venu dans le monde annoncer une nouvelle conception sur Dieu ni même démontrer cette nouvelle attitude par sa bienveillance. Il a fait bien plus. Il a fait la chose qui rend possible le retour des pécheurs : il a donné sa vie pour eux, pour nous. Le péché n’est pas une simple désobéissance, il est le refus des projets du Dieu de vie, il est l’affirmation que nous allons nous donner nous-mêmes les règles de notre bonheur. Ce détournement de notre liberté créée pour aimer va engendrer tant de souffrance dans le monde. Des millions de personnes souffrent à cause du péché ! Si bien qu’il ne suffit pas pour Dieu de dire : j’efface l’ardoise. Il y a un abîme de mal et de non-sens à combler, il y a un désert de désolation à transformer. Et Dieu dit : c’est moi qui vais le faire, c’est moi qui vais vous racheter, c’est moi qui vais parcourir tout le chemin jusqu’à la porte de votre cœur fermé, c’est moi qui vais prendre sur moi tout ce que vous avez détruit.

Ce point fait du christianisme une religion révolutionnaire, car elle prend vraiment au sérieux le problème du mal et apporte la solution que Dieu lui a donnée : accepter d’être livré, trahi, tué, et se relever de la mort subie injustement. Et faire de cela la source d’une grâce qui rejoint tout homme passé, présent et à venir par le moyen de l’Église et des sacrements qui guérissent et relèvent. Le pape disait cette semaine aux jeunes de Singapour que toutes les religions sont des chemins vers Dieu et qu’on n’avait pas à taxer les autres religions de fausses religions1. Cette affirmation, accueillie dans un contexte culturel relativiste, pourrait faire croire à certains que toutes les religions se valent. Je ne crois pas que le pape voulait dire cela, et ce n’est pas vrai : toutes les religions ne se valent pas. L’islam, par exemple, peut être un chemin vers Dieu pour le musulman fidèle, mais aucune religion ne vaut le christianisme comme chemin vers Dieu qui rend compte du problème du mal, de la liberté qui choisit le mal et de Dieu qui sauve cette liberté perdue, qui la guérit et qui la rend sûrement capable d’entrer dans le paradis. « Celui qui croit en moi a la vie éternelle », a dit Jésus (Jn 6,47).

Aujourd’hui, il n’y a pas encore assez de catholiques qui sont conscients que le christianisme est la religion des sauvés, des gens qui se laissent saisir par Dieu, relever par lui, transformer par lui. Comme pour les apôtres, Jésus nous dit tout ce qu’il a fait pour nous et nous nous discutons entre nous de notre côté pour savoir qui est le plus grand, c’est-à-dire comment assurer un avenir humain à notre religion et que nous y ayons une bonne place. Quand nous nous préoccupons de la place qui nous est laissée dans l’Église, nous recevons de Jésus une réponse qui nous sort de nos rêves mondains : sois le dernier, sois le serviteur de tous, imite le Dieu qui est venu servir et donner sa vie. Si tu fais cela, le Père en personne entre dans ta vie.

1Rencontre du 13 septembre 2024 au collège Catholic Junior.