homélie de l’Assomption 2024
Laissons-nous saisir par l’atmosphère de victoire qui émane de ces lectures, spécialement de l’Apocalypse. Nous sommes les amis du Dieu victorieux qui réalise son règne, « le pouvoir de son Christ » (Ap 12,10). Il nous est bon de placer notre vie sous le signe de cette victoire. Ainsi notre cœur peut être brûlant plutôt qu’éteint.
Notre cœur est brûlant lorsque nous voyons souffrir les hommes autour de nous, dans nos villages ou au loin, et que nous souffrons de leurs souffrances, et que nous crions vers Dieu en lui demandant de hâter sa victoire. Notre cœur est brûlant aussi lorsque nous célébrons une victoire dans notre vie, parce que quelque chose de difficile s’est finalement bien passé, parce que nos durs efforts ont été couronnés de succès, parce que nous avons vécu quelque chose de très beau. Et nous pouvons alors glorifier Dieu pour ce qui s’est passé. Mais, trop souvent, il n’y a pas cette grande plaie ouverte parce que nous souffrons du mal des autres, ni cette grande joie d’avoir remporté une victoire, mais seulement des petites compensations que nous nous donnons au milieu de la grisaille de nos journées, parce que finalement notre cœur est éteint.
Comment réveiller notre cœur, rallumer son feu intérieur ? En aspirant à la victoire de Dieu et en la célébrant déjà. C’est ce que nous faisons dans l’attitude de louange, ou bien dans la célébration de l’eucharistie. Seigneur, nous sommes ici pour célébrer ta victoire et la vouloir la plus large possible, car c’est la victoire contre tous les pouvoirs de mensonge, de domination, contre tout ce qui opprime l’homme, et finalement contre la mort. Tu es le Dieu qui a remporté la victoire, et ton règne avance. Nous le voyons dans la foi et l’espérance, nous le voyons quand notre cœur déborde de charité.
Comment a lieu cette victoire ? Aujourd’hui nous découvrons que ce n’est pas la victoire d’une armée, ni d’une organisation, ni de la science, mais la victoire d’une mère qui nous donne quelqu’un, le Sauveur. Cela semble si fragile, si incertain. La vision de l’Apocalypse nous montre le dragon qui est là pour dévorer l’enfant. Comment Dieu prend-il le risque d’une telle faiblesse ? C’est pour venir à la porte de nos cœurs, par son amour. Dieu ne nous sauve pas de loin, en changeant l’organisation du monde, mais en nous permettant d’être acteurs de ce salut, afin que sa lumière nous réjouisse au plus profond. « La mort étant venue par un homme, c’est par un homme aussi que vient la résurrection des morts », dit saint Paul (1 Co 15,21). Nous ne serons pas des étrangers au Ciel. Nous serons chez nous parce que nous aurons lutté aux côtés du Fils de Dieu qui s’est fait l’un de nous. Nous n’éprouverons pas de la joie comme spectateur comme quand nous voyons Nafi Thiam revêtir sa 3e médaille d’or. Mais nous éprouverons de la joie comme si nous étions Nafi Thiam. Grâce au Fils de Dieu qui s’est fait homme pour nous apporter la résurrection des morts et qui nous permet de lutter à ses côtés par la foi, l’espérance et la charité.
Et comment cela est-il venu ? C’est Marie qui rend possible cette victoire et cette joie. Elle est la mère du Sauveur, la mère « de mon Seigneur » comme vient de dire Élisabeth. C’est le fruit de ses entrailles qui est béni. c’est grâce à elle que tous peuvent « recevoir la vie dans le Christ » (1 Co 15,22).
Marie, la mère du Sauveur, voit ce bonheur même quand il n’est pas encore réalisé. Elle chante les hauts-faits de Dieu dans le Magnificat (Lc 1,46) alors que personne ne les voit encore. elle ouvre cette espérance, et elle peut nous apprendre à tenir dans l’espérance. « Désormais toutes les générations me diront bienheureuse », dit-elle. C’est ce que nous faisons aujourd’hui ; c’est ce que nous faisons quand nous prions le chapelet, quand nous chantons Marie. Et elle nous aide à tenir du côté de la victoire de Dieu, même quand l’adversaire voudrait ternir notre vie, nous décourager, nous faire entrer dans la résignation. Marie prie pour nous, elle est la mère offerte aux pécheurs, et elle voit les merveilles que Dieu fait, ce que le pécheur ne voit plus et se décourage. Marie est la femme de la victoire, dès maintenant. Prenons-la comme mère !