homélie du 27e dimanche B, 6 octobre 2024

Un professeur de religion dans le secondaire demandait à ses élèves : dans la Bible il y a deux sortes de mariage : un mariage où on peut divorcer, et un mariage où ce n’est pas possible ; lequel des deux est le mariage de l’Ancien Testament ? Lequel des deux est le mariage selon Jésus ? Les élèves se dirent entre eux : Jésus est bienveillant et tolérant ; sûrement il a compris qu’il y avait des cas où on pourrait se remarier, tandis que dans l’Ancien Testament c’est un Dieu exigeant et dur, qui a imposé un mariage pour toujours. Voilà ce qu’ils se disaient, et après avoir entendu l’Évangile d’aujourd’hui vous savez que ce n’est pas ainsi qu’il faut réfléchir (Mc 10,2-16).

Ce fut la surprise pour les élèves, comme ce fut la surprise pour les auditeurs de Jésus, notamment les disciples, qui demandent des explications. Jésus explique : « Celui qui renvoie sa femme et en épouse une autre devient adultère envers elle. Si une femme qui a renvoyé son mari en épouse un autre, elle devient adultère. » La situation devient finalement semblable à celle du pape François répondant aux journalistes dans l’avion qui le ramenait de Belgique. La réponse de Jésus au sujet de l’adultère choque comme celle du pape au sujet des médecins qui pratiquent un avortement. Jésus comme le pape sont en train de nous dire : ne voulez-vous pas comprendre ce qui est en jeu ? Pour le pape, c’est la valeur de l’enfant dans le sein de sa mère. Il n’a pas condamné la maman qui a recours à l’avortement au cœur d’une immense détresse, abandonnée du papa et de sa famille. Nous savons que ce que nous devons conseiller à cette maman c’est : reviens au Seigneur, il veut te pardonner, demande à être réconciliée avec lui… et avec toi. Mais le pape a lancé un cri : jusqu’à quand fermerez-vous les yeux sur cette petite vie qui est là, qui ne peut que grandir, qui est déjà un être humain ? — Car oui, contrairement à ce que disent quelques scientifiques extrêmes, l’embryon humain n’est pas un amas de cellule, comme le serait une tumeur ou un kyste, mais un « être vivant humain », selon le mot du professeur japonais Eiichi Momotani ; il se développe selon son propre programme génétique, pilotant même le corps de sa maman pour cela ; qualifier la qualité humaine de l’embryon à partir de ses compétences nous entraînerait sur une pente où il faudrait aussi se poser la question des compétences humaines du nouveau-né, qui ne se conçoit pas séparé du corps de sa maman, qui est incapable de se reconnaître dans un miroir, etc. Bref, revenons au centre du sujet : notre société a anesthésié sa conscience, elle se gonfle d’orgueil avec un prétendu droit à l’avortement, qu’elle veut imposer partout mais qui ne repose sur rien que la liberté détachée de tout. Il ne s’agit pas de condamner les mamans ; il s’agit que la société se réveille de son silence de mort.

Jésus a eu des paroles électrochoc du même genre au sujet du mariage. Là aussi certains diront : Jésus juge ceux qui ont dû divorcer alors qu’ils étaient battus, méprisés, rejetés. Mais Jésus ne parle pas de celui qui se sépare, il parle de celui qui pense qu’après il est libre de se remarier. Et comme le pape dans l’avion, il rappelle : lorsqu’ils se sont mariés, si c’était un vrai mariage, un mariage valide, ils se sont unis d’une façon telle que c’est Dieu qui les unissait, et on ne peut effacer cela.

Dieu a donné aux hommes d’engendrer de nouveaux êtres qui sont éternels, qui ont une dignité infinie. Et il a donné aux hommes de pouvoir sceller une alliance qui engage toute leur vie. Il arrive que nous aurions préféré que Dieu ne nous fasse pas de si grands dons. Ah si l’enfant conçu n’était qu’un petit animal ! Et si l’engagement pris devant Dieu pouvait être caduque le jour où nous le souhaitons ! Mais ce n’est pas ainsi. Comment allons-nous nous en sortir ? En considérant que ces dons trop grands sont une bonne nouvelle, une marque de la présence de Dieu dans nos vies. En admettant que nous ne sommes pas seuls avec cela, que nous pouvons compter sur Lui pour vivre une grossesse non désirée ou un mariage pour toujours. Dieu ne fait pas des dons aux hommes pour les écraser de responsabilités insurmontables, mais à cause de leur dignité spéciale : nous sommes collaborateurs de Dieu. Qu’il nous apprenne à fonder notre vie sur lui dans le concret de nos choix !