homélie de la messe du 2 novembre 2024

En ce jour, et souvent au long de l’année, nous prions pour les défunts, parce que nous croyons à la vie éternelle. Qu’est-ce que les défunts peuvent espérer après leur mort ? Nous n’en sommes pas réduits à un « peut-être bien qu’il y a quelque chose… », mais nous avons l’expérience des apôtres et des premiers chrétiens, une expérience si forte qu’ils ont préféré donner leur vie pour leur foi que d’y renoncer : les premiers martyrs.

C’est ce que nous avons lu dans les Actes des apôtres (Ac 10,34-43) : il y en a un qui a vaincu la mort, le Fils de Dieu, et il l’a fait pour nous. En tant que Dieu, il n’en avait pas besoin. Mais il s’est fait homme afin d’écraser le pouvoir du diable qui brandissait la mort.

Cette victoire nous est offerte, il n’y a qu’à la saisir par la foi, par l’attachement au Seigneur, par l’amitié que nous choisissons de vivre avec lui : « qui écoute ma parole et croit en Celui qui m’a envoyé, obtient la vie éternelle et il échappe au jugement, car déjà il passe de la mort à la vie » (Jn 5,24).

Ceux qui écoutent la parole du Christ, qui la mettent en pratique parce qu’ils croient en lui, ce sont les saints. Ils ont vécu de tout leur cœur ce que le Seigneur leur proposait. Nous leur demandons souvent de prier pour nous, pour nous aider à être unis au Seigneur comme ils l’ont été.

Mais que penser de ceux dont la foi était une déclaration théorique, qui ne changeait pas vraiment leur vie ? Ceux qui étaient croyants de bouche, sans pratiquer leur foi ? Devons-nous penser que le Seigneur les rejette ? Que penser même de ceux qui n’étaient pas croyants parce qu’on leur avait présenté un Dieu qui leur paraissait injuste ou arbitraire ? Ou même, à la limite, de ceux qui n’étaient pas croyants parce qu’ils préféraient continuer tranquillement leur vie sans Dieu ? L’Église catholique n’a jamais cru qu’il fallait les croire rejetés, mais elle a pensé que le jugement dont Jésus parlait est un jugement qui rend juste plutôt qu’un jugement qui condamne. C’est un jugement qui purifie celui qui a vécu l’Évangile imparfaitement. Et c’est pour cela que nous prions pour nos défunts. Et pour certains défunts nous pressentons qu’il y a du travail !

Nous ne prions pas pour amadouer Dieu et lui faire changer d’avis au sujet des défunts. Nous ne prions pas pour que Dieu soit plus miséricordieux qu’il ne l’est. Cela n’a pas de sens. Dieu est bonté, miséricorde, et il est justice à la fois. En Dieu justice et miséricorde ne sont pas comme en balance, mais travaillent ensemble à la sanctification du pécheur. Alors nous prions pour accompagner la transformation intérieure du défunt, une transformation coûteuse, car il doit se laisser transformer, et accepter le « temps » que ça prendra, la progressivité du changement en profondeur, tout en ayant entrevu l’immensité du bonheur du ciel. Nous prions pour qu’il ne se décourage pas en constatant le mal qu’il a pu faire autour de lui, les personnes qu’il a blessées, les dégâts qu’il a causés. Nous prions pour qu’il s’ouvre au cœur de Dieu au plus vite et que le renoncement à tout ce qui était égoïste, orgueilleux ou futile dans sa vie soit facilité. Tout ce travail intérieur, nous l’appelons depuis des siècles le purgatoire. Le purgatoire n’est pas comme un examen de passage qu’on peut rater, mais il est la purification nécessaire à de nombreux défunts pour entrer dans la vie éternelle s’ils n’ont pas choisi par eux-mêmes le chemin de l’enfer. Les âmes du purgatoire sont heureuses parce qu’elles savent qu’elles sont sauvées, même si leur adaptation à la grâce doit encore leur coûter beaucoup.

Prier pour les défunts est un bel acte d’amour. Et de nombreux spirituels affirment qu’en retour les âmes du purgatoire prient pour nous. Et ainsi, petit à petit nous nous branchons sur la joie du Ciel, la joie d’aimer Dieu qui nous aime. Nous trouvons ainsi des forces nouvelles et nous nous remplissons d’espérance. Dieu n’abandonne pas ses enfants, il a préparé pour eux des merveilles. Il a remporté la victoire sur le mal.