homélie de mariage, septembre 2013
{joomplu:23}Valérie et Joachim, vous avez choisi des textes où l’on parle d’amour, et cela nous fait du bien à tous. L’amour est central dans la vie de toute personne, bien qu’il ne prenne pas toujours la même forme. C’est le pape Jean-Paul II qui disait « L’amour est l’un des processus de l’univers qui (…) élargissent et enrichissent ce qui est étroit et limité. (...) Les hommes ont besoin de tendresse ! Ils ont besoin d’intimité ! » Pourtant il ne vivait pas en couple, mais il savait ce qu’est l’amour, parce qu’il aimait profondément Dieu, et des amis proches. Vous, Valérie et Joachim, vous prenez le chemin du mariage, vous allez explorer le bonheur d’être choisi par quelqu’un pour la vie, et de devoir le choisir pour la vie. Moi qui vous parle, j’ai choisi un autre chemin, celui de l’amour préférentiel pour Dieu, et il n’est pas sans bonheur non plus.
Ce n’est pas évident qu’il soit raisonnable de fonder sa vie sur l’amour, quand on voit toutes les trahisons qui peuvent arriver à l’amour. Mais vous choisissez de le faire et les Églises réformée et catholique ne vous abandonnent pas comme de doux rêveurs ou des entêtés, elles vous disent : oui, on peut aimer jusqu’au bout, on peut aimer comme le Christ nous a aimé.
Quand on voit ce qu’est devenue la fidélité, on peut se demander si l’amour peut durer toujours. Il faut être clair, si l’amour n’est qu’un sentiment, alors non, il ne peut pas durer toujours. Mais l’amour est plus que cela : il est la collaboration entre un sentiment et une volonté. Il y a des moments où je suis porté vers l’autre par un sentiment chaud, et des moments où je vais décider de l’aimer et de rester avec lui bien que je n’éprouve plus de sentiment. Je vais rester avec lui parce que je l’ai promis ; vous allez vous promettre non pas de rester amoureux mais de vous aimer.
Au départ, on est attiré par une personne, cela se développe et c’est le sentiment amoureux, qui nous pousse naturellement hors de nous-mêmes et de nos habitudes pour aller à la rencontre de l’autre. C’est un peu comme le décollage d’une fusée, dont les moteurs puissants l’arrachent à la pesanteur terrestre. Puis ce sentiment amoureux vient à passer, on s’habitue l’un à l’autre, on a l’impression de s’ennuyer un peu, que l’autre ne nous apporte plus tout ce qu’il nous apportait. Le sentiment amoureux n’est plus au rendez-vous, et il arrive même qu’il soit à un autre rendez-vous… Est-ce la fin ? Est-ce le signe qu’il faut passer à une autre histoire d’amour ? Est-ce que la fusée va s’écraser sur la terre quand ses moteurs se sont vidés ?
C’est là que va intervenir le choix d’aimer. Le moment où l’être humain va cesser d’être le jouet de ses sentiments pour prendre appui au plus profond de lui-même et décider de s’attacher encore à l’autre. À ce moment là l’amour devient vraiment créateur, il est fabriqué au creuset de notre être et Dieu peut nous aider à cela. Dire à l’autre dans son cœur, en contemplant son visage : « je décide de te garder au centre de ma vie. Et je me réaffirme sans cesse cette décision ». Vivre ainsi va faire jaillir un nouveau sentiment, bien plus intime, plus lumineux aussi. C’est l’allumage du deuxième étage de la fusée, qui va la propulser sur orbite. Il faudra que vous mettiez cela en œuvre dans votre vie. Et si tous ceux qui sont mariés pouvaient aujourd’hui se regarder et se dire : « je te veux au centre de ma vie », ce serait très bien.
Il n’y a pas d’amour parfait, mais on peut toujours progresser dans sa façon de donner et recevoir de l’amour. C’est une nécessité, et ce progrès est possible grâce au pardon. Quand je demande pardon, je reconnais que j’aurais dû agir autrement, je cesse de dire à l’autre : je suis ainsi, tu n’as qu’à t’y faire ! Quand je pardonne, je dis à l’autre que je l’accueille, que je veux l’aimer, lui ouvrir encore mon cœur. C’est ainsi que l’amour peut grandir malgré nos faiblesse. L’amour humain est un amour à pardon. Il y a des moments désagréables dans la vie d’un couple, car l’amour doit se frayer un chemin à travers la jungle de notre égoïsme et de nos blessures. Mais ces moments désagréables deviennent par le pardon des moments d’espérance.
Et puis je vais vous confier une source : la prière. Ce temps avec Dieu est une façon de faire le plein… Quoique je n’aime pas tellement cette expression, qui pourrait faire penser qu’on va mettre Dieu au service de notre amour… En réalité, on n’utilise pas Dieu, on l’aime. Il nous propose non pas de se mettre au service de notre amour, de nos projets, mais de pouvoir mettre notre amour à son service, au service de son grand projet d’espérance pour le monde, de son désir de nous faire deviner la joie de la vie éternelle.