Homélie du 22 janvier 2012, 3ème dimanche du Temps ordinaire
Aujourd’hui nous assistons au début de la mission de Jésus et comme le début va donner toute la couleur de l’ensemble c’est intéressant de regarder ce que Jésus dit. Il dit cette parole qui m’a toujours surpris à vrai dire : « Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle ». C’est ainsi que débute la mission de Jésus. La Bonne Nouvelle comprend une conversion parce que le Règne est proche. J’ai donc envie de vous parler un peu de la conversion même si nous sommes encore à un mois du carême…
En fait se convertir c’est une manie des chrétiens. Regardez comment nous avons commencé la messe, nous avons commencé la messe en disant : « Seigneur prends pitié de nous car nous sommes des pécheurs » et nous faisons cela à chaque messe. Je me demande quel autre groupe humain commence ainsi ses rassemblements.
Imaginez un petit peu que le 1er mai on commence les discours en disant : « C’est la crise et nous devons reconnaître que c’est de notre faute nous les travailleurs ou bien nous les banquiers, etc. » Ce serait amusant mais au lieu de cela l’attitude courante est de dire que si cela ne va pas c’est à cause des autres… Nous, nous commençons par dire « Seigneur prends pitié de nous pécheurs ». C’est donc que nous vivons déjà cet évangile que Jésus commence à proclamer. Cela a bien marché, il a commencé sa prédication en disant : « Convertissez-vous… » et nous qui nous rassemblons en son nom nous commençons la messe en disant : « Convertis-nous… ».
Qu’est-ce que cela veut dire se convertir ? La racine hébraïque d’où vient le mot indique un changement de route, une sorte de retournement.
Il y a donc deux mouvements : d’abord se détourner du chemin qu’on prenait avant, faire un choix différent du choix que l’on avait fait ; et dans la foulée — c’est le deuxième point — s’orienter vers autre chose. En l’occurrence s’orienter vers le Règne de Dieu qui est tout proche, vers l’amour du Père qui nous appelle et qui change nos vies.
Comment va t-on faire cela, se détourner, faire un choix différent du premier choix ? Il faut d’abord examiner un peu nos attraits spontanés, parce que ce n’est pas parce qu’ils sont spontanés qu’ils sont bons.
Remarquez, il y en a qui ont un bon fond et qui ont l’impression qu’il leur suffit de suivre leur réaction spontanée. Ce sont des personnes qui d’emblée sont généreuses, accueillantes, bienveillantes… Mais même ceux qui ont un bon fond sont parfois victimes d’un certain aveuglement sur eux-mêmes ou d’intentions cachées. Cela apparaît lors des contrariétés, quand l’amour propre est blessé ; alors ils voient bien que les intentions qui les conduisaient n’étaient pas aussi généreuses qu’ils l’imaginaient. Qu’ils demandent donc au Seigneur sa lumière.
Il y en a d’autres qui partent avec beaucoup de longueurs de retard — rappelez-vous cet exemple du prêtre bougon et colérique dont je vous parlais il y a quinze jours —, plein d’autres qui ne sont pas gâtés par la nature au niveau du cœur. Spontanément par exemple ils jugent durement les autres ou bien ils sont obnubilés par la jouissance ou par le pouvoir qu’ils peuvent exercer autour d’eux, ou bien ils mettent leur vie dans leur tête plutôt que dans leur cœur et ils ne risquent jamais d’aimer. Eux voient peut-être d’avantage qu’ils ont une conversion à vivre ! Eh bien qu’ils ne se découragent jamais de chercher à prendre un autre chemin.
C’est une conversion des actes que nous devons vivre, et plus profondément c’est une conversion du cœur. Il s’agit d’éduquer notre capacité à désirer. Dieu nous a donné une capacité à désirer, à désirer ardemment. C’est un don de Dieu pour pouvoir aimerq pour pouvoir lui donner notre cœur, pour pouvoir nous aimer les uns les autres. Il faut éduquer cette capacité de désirer.
A première vue quand on parle de l’amour de Dieu, çà semble être une notion un peu théorique… Je vous dis que Dieu nous aime et vous vous dites : j’écoute cela tous les dimanches ! Cela paraît un peu abstrait mais lorsque qu’on convertit son cœur, qu’on le laisse fondre devant Dieu plutôt que de l’occuper à mille choses, alors l’amour de Dieu devient une lumière et une joie dans nos vies.
La conversion c’est une bonne nouvelle, la conversion c’est une joie car c’est une libération, une nouvelle disponibilité pour faire ce pour quoi nous sommes faits, ce qui nous correspond vraiment : aimer en nous donnant nous-mêmes, en faisant reculer la quête égoïste de nos intérêts, en vivant une vraie ouverture de soi à l’autre, cette ouverture que l’on voit à l’œuvre dans la Trinité où ni le Père, ni le Fils, ne retiennent rien dans le partage d’eux-mêmes l’un à l’autre qu’est l’Esprit Saint.
Que le Seigneur nous donne de rechercher une vie plus belle, une vie plus lumineuse et de la lui demander, car c’est lui qui détient le secret de cette lumière intérieure.
Tout à l’heure, avec les enfants de la catéchèse des saints, nous allons découvrir la prière du cœur avec l’histoire du « Pèlerin russe ». Je me dis d’ailleurs qu’on pourrait avec les parents faire quelque chose autour de l’expérience intérieure de cet homme. C’est si beau d’apprendre à demeurer avec Dieu, de convertir son cœur à la présence de Dieu qui est là avec nous à chaque instant et pouvoir en vivre en dépit de toutes les distractions qui nous assaillent, de toutes les tristesses tapies dans notre cœur.