homélie du 11e dimanche C, 12 juin 2016
Une{joomplu:527} pécheresse fait irruption chez Simon le pharisien pour voir Jésus, pour être près de lui (Lc 7,36ss). La démarche de cette femme nous apprend beaucoup sur le péché, sur le cœur humain et sur le cœur de Dieu. « pécheresse », pour nous c’est une bière ! Et cela évoque une femme de mauvaise vie. Luc n’est pas si explicite. Lui qui connaît bien le grec trouve un seul mot pour la désigner : « une pécheresse », en grec, amartôlos, qui signifie : « qui fait fausse route, qui se trompe ». Et cette femme semble avoir fait tellement fausse route qu’elle est toute entière qualifiée par son péché, comme si elle y était si enfoncée qu’elle ne dépasse plus de cette coque qui l’emprisonne.
Elle s’est trompée, mais au passage de l’homme de Dieu, lorsqu’elle voit en lui la communion qui est possible avec Dieu, elle se rend compte que c’est autre chose qu’elle est appelée à vivre. Il y a dans le cœur de cette femme un fameux cocktail de sentiments : un grand désir de paix, que Jésus comblera en lui disant « va en paix ! » ; une profonde tristesse du péché, manifestée par ses pleurs ; et « beaucoup d’amour », selon la parole de Jésus.
C’est l’amour qui a amené la femme à Jésus. Encore fallait-il qu’elle sache que c’était possible. Sans doute est-ce l’attitude de Jésus qui lui a donné d’oser venir et s’incruster chez Simon. Elle a dû croiser Jésus dans la ville, elle a dû voir comment il se comportait avec les gens, elle a dû sentir son amour posé sur chacun. Elle s’est dit que peut-être par ce rabbi elle ne serait pas rejetée malgré tout ce qu’elle a fait et dont elle a bien conscience. L’attitude de Jésus lui permet de surmonter le découragement et la peur d’être jugée. Et chez Simon Jésus prendra la défense de cette femme méprisée de tous. Le pape François, en ouvrant le jubilé de la miséricorde, donne une espérance à celui qui est découragé par son péché : tu peux revenir, tu peux goûter à nouveau l’union de ton être à Dieu !
Et nous, comment pouvons-nous relayer cela ? Souvent, autour de nous, il semble qu’il n’y a plus d’amour de Dieu qui permettrait de revenir à lui. Mais c’est aussi parce que nous ne laissons pas deviner que le christianisme c’est l’amour de Dieu et pas une liste de règles ou de bonnes attitudes. Nous ne parlons jamais de notre cœur qui cherche Dieu, nous ne disons jamais autour de nous que nous l’aimons. Alors les gens croient que nous sommes catholiques comme si nous étions adhérents d’un parti ou parce que nous avons une vision conservatrice du monde. Mais non : nous sommes catholiques parce que notre cœur cherche le Christ, veut écouter sa parole et veut revenir à lui chaque fois qu’il s’en éloigne. Si nous montrons cela, d’autres nous diront : puis-je vivre cet amour que tu vis ? Est-ce possible alors que je ne m’en suis pas soucié jusqu’à maintenant. Et nous pourrons répondre : je vais te raconter une histoire, celle d’une femme qui avait fait lourdement fausse route…
Il y a une chose que je voudrais encore ajouter : Jésus donne à la femme le pardon de tous ses péchés, et il le fait en prenant sur lui tout ce que son péché avait dégradé. Il peut lui dire : « va en paix ! » Et il assume lui-même les conséquences sociales du péché, l’indignation de ceux qui se croient justes, de ceux qui ont été blessés par son péchés, de ceux qui ne comprennent pas que le pardon soit possible et qui disent maintenant : « qui est cet homme qui va jusqu’à pardonner les péchés ? » Cela le conduira à la croix. Sur la croix, Jésus achève le pardon qu’il a donné aujourd’hui à la pécheresse, la femme qui faisait fausse route et qui a retrouvé la communion avec le Seigneur.