homélie du 26e dimanche A, 27 septembre 2020

{joomplu:86} Ce que le Christ a vécu en se faisant homme nous dévoile la profondeur du mal qui s’est enraciné dans le cœur de l’homme. Quand il devient semblable aux hommes et qu’il veut rester en tout fidèle à Dieu, annonçant la vérité qui vient de Dieu, il est rejeté, condamné sous de faux prétextes et mis à mort. Ceux qui font cela ne sont pas les pécheurs notoires qui ont eu le courage de changer de vie à la prédication de Jean Baptiste. Ils vivaient clairement dans le mal, ils s’étaient noyés dans des flots de sensualité ou de cupidité. Mais ils ont écouté celui qui leur a dit que le mal était mal et que Dieu voulait qu’on en sorte. Bien qu’ils avaient commencé leur vie en disant « non » à Dieu, ils avaient accepté ensuite de faire sa volonté.

Ceux qui ont fait condamner le Christ étaient autrement contaminés par le mal. Ils se sont fait un nom, ils ont acquis une réputation sur les réseaux sociaux de l’époque. Ils parviennent à dissimuler leurs pratiques mauvaises, ou à faire croire qu’elles sont nécessaires, ou sans importance et très répandues. Et lorsque Jean Baptiste vient leur dire qu’ils sont dans l’erreur, ils essaient de le faire passer pour un possédé. Ils ne veulent absolument pas accepter la vérité sur leur vie, sur leurs choix, sur leurs ambitions, et tous ceux qui seraient une menace pour leurs projets doivent être écartés. Ils se sont forgé une image d’hommes respectables. Mais ils ne cherchent pas ce qui est bien. Ils ont perdu le sens du bien. Aujourd’hui, leurs successeurs disent qu’on ne peut pas savoir ce qui est bien et ce qui est mal, qu’il n’y a que du mouvant, du changeant. Ce qui compte pour eux, c’est l’émotion, ou le moyen de faire le buzz, d’être sur le devant de la scène. Le reste, c’est leur vie privée, là où ils peuvent faire « non » après avoir dit « oui ».

J’ai quelque peu modernisé la figure des grands prêtres et anciens du peuple à qui Jésus s’adresse, afin que nous comprenions bien que ce qui se passait à l’époque de Jésus s’est passé partout et à toute époque et se passe aujourd’hui plus que jamais. Le pouvoir du mal qui corrompt les cœurs est énorme. Tant que la personne qui fait le mal est prêtre à reconnaître sa faute, la vie du cœur n’est pas morte et il reste une espérance. Mais pour celui qui refuse de se laisser interpeller, quel avenir reste-t-il lorsqu’il paraîtra devant Dieu qui est le Saint ? Et en attendant, combien de mal n’aura-t-il pas commis ? Combien de familles ne souffrent-elles pas de la part d’un membre qui refuse de reconnaître le mal qu’il commet ? Combien d’institutions ne sont-elles pas gravement handicapées par l’hypocrisie de leurs responsables ? Combien de pays même ne sont-ils pas en train d’avaliser des lois injustes par des parlementaires qui ne veulent plus se poser la question de ce qui est bien ou mal mais se demandent seulement ce qui est utile, ce qui répond aux attentes ou maximise la liberté ?

Vendredi soir, avec les jeunes de la paroisse, nous avons regardé le film « Une vie cachée », qui raconte la vie d’un jeune fermier autrichien à l’époque de l’annexion de l’Autriche par Hitler. Franz Jägestätter est mort parce qu’il a refusé de prêter le serment de fidélité à Hitler. Beaucoup autour de lui disaient : ce n’est que des mots, ça ne t’empêche pas de penser ce que tu veux. Mais lui estimait qu’il devait obéir à sa conscience, faire le bien et refuser le mal, quoi qu’il lui en coûterait. Il préféra servir le Christ plutôt qu’Hitler et le paya de sa vie. Sa vie est restée longtemps un aiguillon douloureux pour tous ceux qui avaient accepté de dangereux compromis avec les puissants. Il n’a pas été reconnu tout de suite comme un héros. Ce n’est qu’en 2007 qu’il a été béatifié par le pape Benoît XVI. Comme le Seigneur envers les notables d’alors, il a exaspéré tous ceux qui voulaient garder une image d’honorables citoyens tout en pactisant avec les mensonges nazis. À première vue il a été broyé par le mal comme l’a été le Christ. Mais il est pour nos temps troublés un témoin de persévérance dans la foi. Que le Seigneur nous aide à faire « oui », que nous ayons auparavant dit « oui » ou « non ».