homélie du 29e dimanche A, 19 octobre 2014
Dieu est{joomplu:18} le Seigneur et il n’y a rien en dehors de lui (Is 45,5). Même ceux qui ont un pouvoir devraient se regarder comme des gens qui ont reçu ce pouvoir de Dieu — et qui donc auront des comptes à lui rendre sur la façon dont ils ont exercé ce pouvoir. Comme cette pensée est libératrice, dans notre monde où nous avons plutôt l’impression que les seuls à qui on rend des compte sont le cours de la bourse et la bienveillance des téléspectateurs ! Comme cela nous donne une espérance que le Royaume de Dieu pourra enfin réaliser la justice à laquelle nous aspirons pour tous ceux dont les droits sont bafoués !
Dans l’Évangile aujourd’hui le Christ dit une phrase devenue célèbre quand on l’interroge sur l’impôt à César : « rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ! » Comment comprendre cela ? Je suis frappé surtout par la fin, qui est vraiment nouvelle par rapport à la question des pharisiens et des partisans d’Hérode : « rendez à Dieu ce qui est à Dieu », comme si l’attitude des interlocuteurs de Jésus ne rendait pas assez ce qui est à Dieu.
Les dilemmes moraux nous donnent souvent l’occasion de ne pas choisir Dieu de tout notre cœur et de nous mettre dans des impasses qui finalement nous donnent l’impression de lieux obscurs où Dieu nous a abandonnés. C’est le cas pour les pharisiens et les partisans d’Hérode qui louvoient entre le respect de Dieu et les exigences de l’empereur et de ses lois (Mt 22,17).
C’est le cas aujourd’hui lorsque nous nous croyons généreux seigneurs en partageant un peu de nos biens mais en restant accrochés au reste, alors que le Christ nous demande de ne pas nous dérober à celui qui nous demande. C’est le cas lorsque la souffrance de quelqu’un nous fait croire que nous avons des droits sur sa vie et que nous pouvons lui donner l’euthanasie qu’il demande alors que si nous voulons préserver la vie sociale nous devons regarder la vie humaine comme inviolable quelle que soient les circonstances. Ces dilemmes qui sont des impasses nous arrivent aussi lorsque l’existence des divorces nous empêche de voir que le Christ a institué un mariage qui dure pour la vie et qui est une grâce ; au lieu de voir cela nous regardons le mariage chrétien comme un boulet et nous nous demandons comment pouvoir tourner la page. C’est encore le cas dans bien des choix de notre existence, où nous sommes mitigés, où nous perdons la radicalité de l’amour, où nous ne rendons pas à Dieu ce qui est à Dieu mais un peu de tout à tout le monde pour tirer notre plan parce que la vie est déjà assez compliquée comme ça.
Et c’est vrai que la vie est compliquée, mais elle se simplifie lorsqu’elle se laisse guider par l’audace de l’amour ; elle se simplifie lorsque notre fidélité au Seigneur nous pousse à faire des choses qui ne paraissent pas très raisonnables au yeux du monde. Ces choses audacieuses seront de bonnes choses, si elles sont motivées par notre désir d’imiter le Christ, d’être un autre Christ dans le monde d’aujourd’hui. C’est bien cela que nous sommes depuis notre baptême. C’est bien ce que nous redevenons chaque fois que nous nous convertissons après avoir erré quelque peu loin de ce que Dieu attendait de nous. C’est bien ce que nous deviendrons pleinement dans la vie éternelle, lorsque « nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu’il est » (1 Jn 3,2). Une vie qui rend à Dieu ce qui est à Dieu, qui se laisse guider par l’amour de Dieu, devient simple et claire comme une eau vive, une eau qui réjouit ceux qui la voient et la goûtent. Que Dieu lui-même soit en nous la source de cette eau !