homélie du 2e dimanche année B, 14 janvier 2018
Nous aurions{joomplu:48} du profit à nous représenter l’état de la société au moment de la vocation de Samuel entendue dans la première lecture (1S 3). C’est une dure époque, où les prêtres de Dieu ne sont pas fidèles mais exploitent le peuple (1S 2). On a l’impression que Dieu est loin, ses manifestations sont rares (1S 3,1) et les gens se détourne de Dieu. À la lecture des textes on devine une indifférence religieuse d’au moins 20 ans (1S 7,2). Et quand les gens invoquent le Seigneur, c’est quand la société est dans l’impasse et c’est pour se servir de lui (épisode de l’utilisation de l’arche et de sa capture par les Philistins, 1S 4).
Mais Dieu est là, et il appelle. Dieu n’abandonne pas son peuple, mais il a pris l’habitude de passer par des hommes, même si cela nous répugne toujours un peu car il y a de l’orgueil en nous. Et il y a ce petit Samuel qui s’enthousiasme au service du Dieu vivant et qui devient son prophète, un prophète qui voit ce que Dieu fait et qui l’annonce, un prophète qui permet de se décider pour Dieu et de le suivre si on n’est pas de mauvaise volonté. Un prophète devant qui on est bien obligé de prendre position (1S 7,3).
Bien plus tard, Jean Baptiste le prophète désigne Jésus : « voici l’Agneau de Dieu ». Ses disciples le suivent, et seront touchés par lui. Ils chercheront à se rapprocher de lui et Jésus les invitera à partager son intimité (Jn 1,35). Il vont connaître Jésus de près et devenir capables d’en inviter d’autres à se consacrer à lui : André appelle son frère Simon, et ainsi de suite. Cela fera un peuple de prophètes, un peuple appelé par le Seigneur (on dit « Église ») et qui proposera à tous de vivre dans l’amitié de Dieu, dans son intimité, par les sacrements, par le service des pauvres.
Au cours des siècles, l’enseignement de ces prophètes façonne la culture, mais il a parfois du mal à être entendu. Dans la deuxième lecture nous avons un échantillon de ce que le prophète doit annoncer, et qui tinte durement aux oreilles contemporaines : notre corps est pour le Seigneur (1Co 6,13). La sexualité n’est pas un simple moyen de se faire plaisir mais une façon d’aimer comme Dieu aime : « notre corps est un sanctuaire de l’Esprit Saint ». L’appel de Dieu à la sainteté concerne aussi notre corps : que nous le regardions comme consacré à Dieu : « il est pour le Seigneur ». Alors nous ne nous résignons pas à tous nos désirs fous, mais patiemment nous les obligeons à entrer dans le cadre d’un amour généreux et sans jamais utiliser les autres ni nous-mêmes. Notre but est celui de saint Paul : « rendre gloire à Dieu dans notre corps ».
J’ai parlé des prophètes d’autrefois. J’ai laissé entendre que les apôtres veilleront à ce que l’appel de Dieu continue de trouver des cœurs après eux. Que se passe-t-il aujourd’hui ? D’une part la situation religieuse est aussi difficile qu’au temps de la vocation de Samuel. Il y a une indifférence religieuse aussi forte. Beaucoup ne se soucient plus de chercher ce qui est vrai mais seulement ce qui plaît ou qui est commode ou utile. Mais en même temps, Dieu nous donne encore des prophètes. Je pense au pape François, qui nous demande d’ouvrir notre cœur à tous. Mais à bien regarder, tous les papes que nous avons eus depuis un siècle ont été de fameux prophètes pour leur temps, et certains les ont écoutés. D’autres prophètes aussi nous ont exhortés à prendre Dieu au sérieux et à aimer nos frères concrètement. Leur vie était un exemple et nous faisait désirer accueillir l’Esprit Saint plus sérieusement. Je vois encore quelques prophètes autour de moi. Pas seulement catholiques d’ailleurs. La semaine passée j’ai rencontré un ami protestant et à ce que j’ai deviné de sa vie spirituelle je me dis : il est pour moi un prophète. Et peut-être que nous sommes aussi prophète pour d’autres, à une petite ou grande échelle. Demandons à Dieu de se saisir de nous. Disons-lui : « je suis disponible, parle ! Ta servante, ton serviteur écoute. » Et encore : « maître, où demeures-tu ? Que je passe plus de temps près de toi et donne aux autres le goût de te chercher aussi. »