homélie du 2e dimanche de carême, 28 février 2021
{joomplu:33} Le récit du sacrifice d’Isaac nous scandalise toujours un peu : comment Dieu pouvait-il demander une chose pareille ? Nous avons raison, c’est énorme. D’autant plus que la Révélation de Dieu s’est posée en désaccord avec les pratiques locales, notamment des Phéniciens, qui pratiquaient des sacrifices d’enfants. Si ce récit est si choquant, c’est que cela doit nous apprendre quelque chose d’énorme. Abraham avait attendu 25 ans que se réalise la promesse d’avoir un fils. Pendant 25 ans il avait marché avec Dieu sans voir ce que Dieu avait promis. Marché dans la foi sans résultat apparent. Et voilà que le fils enfin obtenu, il faudrait le sacrifier à Dieu. Abraham aurait tellement pu dire : ah non, maintenant je le garde hein ! Mais non, il obéit à Dieu, c’est-à-dire qu’il l’écoute avec confiance. Et ensuite il apprend qu’il en est doublement béni.
Abraham est le père des croyants. Son expérience est un guide pour tout croyant. Les incroyants disent facilement qu’on croit pour se rassurer. Avec Abraham on voit bien que c’est tout sauf rassurant. Surtout, on découvre le cœur de la foi : s’attacher à Dieu pour lui-même. St Jean de la croix : préférer le Dieu des dons aux dons de Dieu. C’est si fréquent et toxique pour notre joie d’en rester aux dons espérés ou reçus. Quand le grand don c’est Dieu et rien que lui. Le cœur de Dieu à posséder ! !
Devenons allié, ami de Dieu, plutôt qu’un croyant intéressé. Nous sommes toujours tentés d’être un croyant intéressé, qui utilise volontiers Dieu à son service. Les croyants non-pratiquants sont encore plus exposés à cela, car ils ont encore moins l’occasion d’une démarche de gratuité envers Dieu. Comment notre prière peut-elle être désintéressée si nous disons : à quoi cela me sert-il d’aller à la messe ? Aller à la messe, ou la suivre à la TV quand on ne peut plus, c’est l’occasion d’une prière gratuite, l’occasion de dire à Dieu : je t’aime parce que c’est toi, et pas pour ceci ou cela que tu me donnes ou me donneras. Toi, toi, toi ! C’est toi que je veux.
Seigneur, augmente notre foi, pour que nous soyons prêts à tout. Tu vois notre faiblesse, nos hésitations, notre pusillanimité. Comme nous craignons le risque et des difficultés ! Tu n’as pas besoin de croyants mercantiles ou intéressés. Ils te sont un fardeau et une peine. Ils s’en vont quand survient la croix. Ils n’ont pas le cœur assez solide pour accueillir tes dons. Ce qu’ils espèrent de toi est si peu.
Or, près de toi c’est la richesse infinie, hors norme, que l’on voit dans le visage de Jésus transfiguré.
Comment on fait ? En marchant fidèlement. Même sans comprendre. Foi aveugle ? pas dans le sens qu’on nous reproche à tort, « je crois parce que c’est absurde ». Mais dans le sens d’une confiance qui refuse de se reprendre même quand on ne comprend pas. Une confiance qu’on ne met en balance pour rien. ↔ si ça ne marche pas je peux toujours faire du chantage ou partir. Ah le chantage envers Dieu. Comme c’est mauvais pour nous !
Marcher dans la foi même dans la nuit. À qui irions-nous, Seigneur ? Tu as les paroles de la vie.
L’histoire d’Abraham et l’évangile nous disent que notre cœur est fait pour les grandes choses, ces grandes choses de l’amour, qui ne s’obtiennent pas dans le confort mais dans l’effort, et parfois aussi dans les épreuves. Vivons tout ce qui nous arrive avec la volonté que cela agrandisse notre cœur.
Nous avons entrevu Dieu dans la Transfiguration. Notre cœur aspire secrètement à lui être tout uni. Regardez comment nous sommes quand le soleil brille, et a contrario quand il fait sombre pendant des jours. Sans le voir clairement nous aspirons à la vie éternelle. Où nous verrons Dieu, et où nous serons semblables à lui. Tous ceux qui le contemplent deviendront rayonnants.