homélie du 21e dimanche B, 22 août 2021
{joomplu:559} Saint Paul compare le lien entre l’Église et le Christ au lien entre la femme et l’homme (Ép 5,21-32). Une fois que nous aurons dépassé une interprétation à la taliban, nous allons y trouver des indications précieuses pour comprendre la façon dont le Seigneur nous aime, et aussi pour enrichir nos relations homme/femme.
La façon dont le Christ aime l’Église, c’est qu’il s’est livré pour elle. Il s’est donné tout entier, il a institué l’eucharistie en disant : « ceci est mon corps livré pour vous », en précisant : « ma chair est la vraie nourriture et mon sang est la vraie boisson ». Pour cela, nous venons d’entendre qu’il est prêt à perdre les disciples qui ne l’admettent pas. Le Christ est l’époux de l’Église dans le sens qu’il a pris l’initiative de l’alliance, qu’il a scellé cette alliance en donnant sa vie sur la croix et en se donnant à chaque eucharistie.
Un mari doit voir là une source d’inspiration quant à la manière d’aimer son épouse. La juste façon d’aimer sa femme est, pour un homme, de se consacrer à elle, de lui faire le don de sa vie. J’aime dire que saint Paul rappelle à l’homme et à la femme ce qu’ils ont le plus tendance à oublier. Il ne dit pas à la femme de se consacrer à son mari. Ce n’est pas nécessaire, elle le fait d’habitude très spontanément. Cette tendance à se donner soi-même dans l’amour est comme inscrite dans son être profond. Il y a peut-être là une composante de l’instinct maternel, qui fait que le péché originel a moins abîmé sa nature dans ce domaine. Toujours est-il que pour l’homme, c’est beaucoup moins évident de se donner soi-même dans l’amour. L’homme, spontanément, est plus enclin à prendre, et à utiliser en vue de tel ou tel projet, y compris utiliser son épouse. Le progrès spirituel, pour lui, va être d’apprendre à se donner lui-même. Jusque dans la vie intime, il aura à travailler cela, afin d’aimer vraiment, d’aimer en se donnant, plutôt que d’aimer à son profit, en utilisant ou pire, dans les cas extrêmes, en exploitant. C’est pourquoi saint Paul, avec un clin d’œil manifeste, va jusqu’à dire que le mari doit aimer sa femme comme son propre corps, dont il prend soin si volontiers. Et c’est vrai, j’ai déjà souvent entendu parler des besoins des hommes. Il est temps que les hommes pensent aux besoins des femmes.
Passons à l’Église. L’Église cherche son inspiration dans le Christ. Elle le prend pour sa tête, pour son leader, pour celui qui va la conduire vers la vie. La tentation de l’Église, c’est de se débrouiller toute seule, d’avoir en elle-même de quoi faire du bien tout en se référant somme toute fort peu au Seigneur. Si souvent, l’Église se demande : qu’est-ce que je pourrais faire pour le Seigneur ? Plutôt que d’apprendre à compter sur Dieu, à s’appuyer sur lui, à laisser de la place à son action à lui. Le symptôme le plus évident, c’est la difficulté de prendre au sérieux la prière, de la faire passer après l’action, s’il reste du temps et de l’énergie.
Une épouse doit voir là une source d’inspiration pour trouver la manière d’aimer son mari. Saint Paul dit abruptement : « soyez soumis les uns aux autres… les femmes à leur mari comme au Seigneur Jésus ». Ah, combien il y a eu d’interprétations machistes de ce verset ! Il ne s’agit pas d’y chercher une justification pour une domination indigne de l’être humain. Si on le fait, c’est qu’on oublie la partie que je viens de décrire au sujet des maris. Encore une fois, saint Paul rappelle ce que chacun oublie. Il ne doit pas dire aux hommes d’être soumis à leur femme, puisqu’ils le sont déjà tellement. Regardez la vie de la famille : qui est capable de gérer les multiples relations entre les membres ? Qui se rappelle des anniversaires ? Qui parvient à organiser avec compétence le programme des journées ? N’est-ce pas l’épouse ? C’est au point que le mari, souvent largué, reste là à bougonner ou à manifester de façon désagréable qu’en fait il est dépassé, et donc soumis. Et puis il perd le sens des initiatives, il se contente d’exécuter ce qu’on lui demande, bon gré mal gré.
En disant « femmes, soyez soumises à vos maris », Paul propose à la femme de promouvoir l’esprit d’initiative de son époux dans la vie familiale. Qu’elle puisse dire : vas-y, tu peux le faire ! Je veux que tu prennes la tête, que tu te mouilles, je te donne la place pour t’engager. Ce n’est pas facile pour une femme de faire cela, elle aura d’abord l’impression qu’il y a beaucoup de flottement. De même que l’homme qui apprend à servir plutôt qu’être servi pensera d’abord perdre quelque chose. Mais quel bénéfice ensuite, quelle joie de se promouvoir l’un l’autre pour grandir en sainteté !