homélie du 22e dimanche C, 28 août 2022
{joomplu:375} Jésus a observé l’attitude des gens qu’il côtoyait. Il a observé aussi les disciples. Lui qui est parfaitement humble, il a perçu combien l’amour propre guidait ceux qui l’entouraient, et il a prévu que cet amour propre causerait encore bien des peines et des désastres dans les communautés de ses disciples dans les siècles qui suivraient. Une belle estime de soi peut nous préserver des ravages de l’amour propre. Je dirais volontiers : « l’estime de soi, oui, l’amour propre, non ! » Pensons au psaume : « Seigneur, je te rends grâce pour la merveille que je suis » (Ps 138). Cela permet d’encaisser les blessures d’amour propre, de rester bienveillant envers ceux qui nous ont manqué de considération ou de respect.
La tendance en nous à nous élever est d’autant plus forte que nous avons manqué de cet amour fondateur sur lequel faire reposer notre existence, spécialement l’amour respectueux des parents, des responsables, des éducateurs. Ou si nous-mêmes nous avons choisi d’entrer dans un jeu de séduction où l’amour se gagne par nous-mêmes. Ainsi, si nous nous offusquons du manque de considération, si nous souffrons amèrement des humiliations… également si nous ne parvenons pas à reconnaître nos torts — ce que les autres nous révéleront —, si nous pensons que ce qui ne va pas est toujours de la faute des autres, c’est sûrement que nous avons une blessure à présenter au Seigneur pour qu’il la guérisse. Nous vivons un manque de cet amour fondateur qui nous permet d’exister sans devoir nous hisser au-dessus des autres et avoir quelqu’un à regarder de haut. L’amour de Dieu guérit de ce qui n’a pas été donné naturellement. Dieu est Père. Sans compter la maternité de la mère du Sauveur qu’il nous a donné comme mère. Nous pouvons prier ainsi : « Mon Dieu, apprends-moi combien tu m’aimes, et que je n’ai pas besoin de me composer une image devant toi… apprends-moi que tu m’admets avec mes manquements et mes faiblesses.
Une juste estime de nous-mêmes pourra nous permettre de rechercher l’humilité comme un des trésors les plus précieux. Celui qui est humble est incroyablement fort, il ne cherche pas à se faire respecter, car il avance avec la force de Dieu, et c’est cette force-là qui motive et met en mouvement les autres — ou qui les irrite et les fait décrocher.
Notre modèle, c’est le Christ. Comment est-il humble, lui qui est le plus grand ? Il enseigne le chemin avec force et il le prend résolument, sans abandonner celui qui avance lentement. Son amour est plein de respect. Cela ne signifie pas qu’il va dire à quelqu’un « reste où tu en es dans ta foi et ta conversion, vivote là où tu es arrivé, c’est déjà bien pour toi »… Sa miséricorde le fait espérer pour nous : il donne à chacun le goût d’avancer plus loin, à partir d’où il est, avec ses faiblesses, pour finalement devenir parfait. Son humilité fait que jamais nous ne nous décourageons, même si nous tombons et devons nous relever.
Penser ainsi, se laisser tirer ainsi par le Seigneur permettra d’éviter de confondre l’humilité avec la bassesse. Il ne faut pas se glorifier de sa petitesse, mais de ce que Dieu peut en faire. Ne regardons pas l’humilité de Dieu, sa descente vers nous, comme une permission de rester dans nos ornières. Mais comme un appel d’amour auquel nous osons répondre. Le Seigneur ne s’est pas fait petit pour que nous restions petits, mais pour que nous devenions grands par lui. Tandis que nous cherchons à devenir grands par nous-mêmes, apprenons plutôt à recevoir cela du Seigneur !