homélie du 15e dimanche B, 15 juillet 2018
En bref{joomplu:206} : Dieu a besoin des hommes pour dire sa parole de vie. Mais cette parole n’est pas facile à accueillir. Où en sommes-nous personnellement ?
Aujourd’hui je suis frappé par le contraste que la liturgie a organisé pour nous entre le mauvais accueil du prophète de Dieu et la beauté de la parole qui y répond dans le psaume. Dans l’histoire d’Amos, les autorités lui disent : va-t-en, nous ne voulons pas de ta parole, tu nous déranges. À quoi Amos doit riposter : je ne viens pas de moi-même, c’est le Seigneur qui m’envoie! Et que dit le Seigneur ? Le psaume nous l’apprend : « ce qu’il dit c’est la paix… amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent…»
Quand Jésus envoie les Douze — apôtre veut dire envoyé —, il les coache pour une mission délicate. D’un côté c’est génial, car il s’agit de participer aux progrès du Royaume de Dieu : enseigner, chasser les démons, faire des guérisons. Comme tout cela est motivant. D’un autre côté, cela sera difficile. Il faut se méfier de soi-même, de la tendance à l’arrogance, à la suffisance, à passer pour le défenseur d’un ordre établi; c’est pourquoi les Douze doivent partir pauvres, « ne rien prendre pour la route »; qu’ils soient sans moyen qui leur donnerait de l’assurance hormis l’Esprit de Dieu. Et il faut endurer les refus, car il n’y aura pas que l’accueil.
Tout cela nous fait découvrir que Dieu compte sur des hommes pour annoncer sa parole de vie. Malheureuse, l’Église qui se tairait devant les grands défis que les gens doivent affronter, devant les injustices, les mensonges, les idéologies libertaires, les détournements de la vérité, les replis égoïstes, etc. Oui, il faut que les chrétiens parlent, même si cela ne plaît pas toujours, comme quand ils rappellent qu’on ne peut pas décider nous-mêmes qui est un être humain avant la naissance ; ou qu’il faut respecter les personnes homosexuelles sans prétendre qu’il y aurait un mariage homo comme le mariage de l’homme et de la femme ; ou que les migrants ne sont pas des intrus devant qui on peut fermer son cœur, mais des personnes sur qui veiller.
Il faut que les chrétiens parlent de cela et d’autres choses en ayant à l’idée que ce qu’ils ont à dire est une parole de vie. Ce que Dieu veut donner aux hommes est une parole de vie, une parole de lumière. Beaucoup de choses que nous disons de la part du Seigneur ne sont pas compréhensibles en dehors de lui, mais celui qui fait confiance, celui qui écoute avec le cœur, celui-là peut pressentir que même dans la difficulté il y a un chemin de paix et de joie.
On pourra se demander : mais comment être sûr que ce que propose l’Église, notamment sur les questions sensibles, est une parole qui vient de Dieu ? Ça serait bon de passer beaucoup de temps là-dessus, mais en quelques mots je voudrais dire : quand je regarde l’histoire de l’Église, je vois qu’elle a toujours ouvert des chemins de vie, malgré les aveuglements ou les paresses de ses membres et malgré le fait que parfois son enseignement a été partiel et unilatéral. Et quand je lis vraiment l’Évangile, j’y reconnais ce que l’Église enseigne. Enfin, Jésus lui-même a promis que son Église ne nous conduirait pas dans l’erreur.
Ainsi je peux affirmer que ce que l’Église enseigne vient de Dieu et est un chemin de vie. À condition de se tenir à distance d’une tentation subtile du malin : nous inspirer un élan de conversion qui est en fait une recherche de perfection sans la miséricorde, ou avec la miséricorde comme quelque chose dont on aimerait bien pouvoir enfin se dispenser parce qu’on arriverait seul à rejeter le péché. L’enseignement des prophètes, l’enseignement de l’Église a besoin de tomber dans un cœur qui écoute, mais aussi dans un cœur qui recourt sans cesse à la miséricorde, qui recherche la seule perfection valable : celle que donne Dieu lui-même en nous sauvant et en nous justifiant. La lumière ne vient pas de nos réussites mais de l’amour de Dieu pour le pécheur.
Alors, pour finir, je demande : où en sommes-nous dans l’accueil de ce qu’enseigne l’Église ? Comment est-ce que nous nous en remettons concrètement à la miséricorde de Dieu qui elle seule nous libère ?