homélie du 5e dimanche de carême C, 7 avril 2019
Par la bouche{joomplu:377} du prophète Isaïe (Is 43,16-21), Dieu annonce du nouveau, une restauration du monde plus grande que la sortie d’Égypte à travers la mer dont le peuple continuait de faire mémoire. Quelle est cette libération plus forte que l’Exode, que le Seigneur prépare pour bientôt ? Comment serons-nous libérés du mal que nous faisons et de celui qu’on nous fait ? La société aujourd’hui est très dubitative à ce sujet. Le choix qui avait été fait de minimiser le mal pour ne pas avoir à porter de condamnation, de dire : tout est permis… ce choix vient butter contre toutes les formes d’abus que l’on dénonce et que l’on traque de plus en plus finement. Ainsi l’humanité se divise à nouveau entre accusateurs et accusés, tandis que les médias jouent le rôle de pilori moderne. Avec cela nous ne sommes pas libérés du mal, et nous croyons qu’il n’est que chez les autres jusqu’au jour où nous le découvrons en nous aussi.
La libération que Dieu promettait à son peuple nous est venue par Jésus Christ. Le Christ ne libère pas en relativisant le mal, en disant « ce n’est pas grave, je pardonne quand même ». Il libère en sauvant. S’il ne condamne pas, ce n’est pas parce qu’il est tolérant, mais parce qu’il aime le pécheur et l’appelle. Ça ne lui est pas égal, le mal que nous faisons. Ça ne lui est pas égal, ce qu’a fait cette femme de l’évangile traînée devant lui, mais il espère beaucoup pour elle (Jn 8,1-11). Lui, le juste par excellence, il l’aime sans condition, il l’accueille publiquement, tout en ayant conscience de l’incompréhension que cela suscitera. Et puis, par une astuce divine, il désarçonne ceux qui condamnent et parvient à les désarmer. Enfin, il montre à cette femme accusée le chemin du relèvement : « moi non plus je ne te condamne pas, va et désormais ne pèche plus ! »
Moi qui ai trempé plus ou moins dans le mal, comment pourrais-je devenir juste par moi-même ? Seulement en oubliant, en relativisant le mal ou en abaissant les autres. Le Christ propose plutôt : en restaurant, en sauvant ! Aujourd’hui, le chemin par lequel on essaie de faire marcher la société est un mélange instable de tolérance et de condamnation. Il ne nous reste que le critère de l’acquiescement pour faire passer brutalement d’un côté à l’autre. La ligne entre le bien et le mal est celle du « suis-je d’accord ou pas ? » Le Christ ne veut pas que nous soyons condamnés à tourner en rond au gré de nos acquiescements. Il espère pour nous un grand avenir, une vie qui porte du fruit et qui aboutit à la vie éternelle. C’est pourquoi il nous relève et nous fortifie : pour que nous nous convertissions et avancions dans la vie par les chemins du bien, par les chemins de la justice, de la fidélité, de la vérité, de la tendresse. Le Christ n’est pas tolérant, il nous aime d’un amour actif et nous fait entendre l’appel du Père : reviens à moi, reviens à la vraie vie !
Dimanche passé nous redécouvrions que le Père n’attend que cela : que ses enfants qui ont voulu n’en faire qu’à leur tête reviennent à la maison du Père. Aujourd’hui nous voyons comment cela peut se faire : parce que le Christ nous relève. C’est le salut par la foi au Christ, dont saint Paul vient de nous parler (Ph 3,8-14). Alors, Seigneur, donne-nous de te connaître, donne-nous de suivre tes chemins, de faire ta volonté, donne-nous de porter notre croix à ta suite pour éprouver la puissance de ta résurrection. Nous voulons nous attacher à toi car toi seul nous libère.