homélie de la Sainte Trinité 2019
{joomplu:145}Dans l’Évangile et dans les paroles de Paul, on parle de 3 au sujet de Dieu : le Père / le Fils / l’Esprit. Chacun est présenté avec un rôle propre, que je résumerais ainsi d’après les lectures du jour : le Père donne tout, il est la source de tout / le Fils est avec le Père, il reçoit ce que donne le Père et le réjouit ; il donne aux hommes l’accès au Père / l’Esprit enseigne, révèle, fait connaître ; il glorifie le Fils et répand l’amour de Dieu dans les cœurs.
Au fil des siècles, la réflexion a voulu s’approfondir. À partir des années 250, la question devient brûlante : comment sont-ils dieux, tous les 3, alors qu’il n’y a qu’un seul Dieu ? Une solution facile était d’imaginer que le Père crée le Fils. C’était encouragé par Pr 8,22. Au début du IVe siècle cela inaugurera l’arianisme, un courant qui divisera les chrétiens pour des siècles : le Fils n’est pas égal au Père, il fut un temps où il n’était pas, il est comme un être intermédiaire entre le Père et les hommes.
Mais saint Athanase d’Alexandrie et un certain nombre d’évêques avec lui (pas toujours la majorité, il faut le dire) répondront : si le Fils n’est pas égal au Père, comment son action peut-elle nous avoir réconcilié avec le Père ? Comment a-t-il rétabli le lien vivant entre le Père et nous s’il n’était pas vraiment des deux côtés ? Au contraire, il est vraiment Dieu et il s’est fait vraiment homme.
Petit à petit s’esquissait le dogme de la Sainte Trinité : Trois sont en Dieu, depuis toujours. Mais ils ne forment qu’un seul Dieu. Ils forment cette unité par leur union d’amour. « Dieu est amour », il l’est en lui-même.
Quant à nous, si nous existons ce n’est pas pour combler son besoin d’amour. Nous existons parce que nous avons été choisis librement. Nous existons pour nous-mêmes et pas pour que Dieu se serve de nous. Pourtant, notre accomplissement c’est de le servir, c’est de vivre pour lui. Mais librement, à partir de notre propre engagement. C’est pourquoi cela se passe dans la foi (Rm 5,2), dans le mouvement volontaire d’acquiescement intérieur que nous faisons à Dieu.
Comment est l’amour dans la Sainte Trinité ? On peut le deviner à partir de ce que dit Jésus sur son lien au Père. C’est un amour basé sur une totale confiance et sur un don total de soi-même à l’autre. C’est ce que veut dire « Fils » : celui qui n’existe que par un autre, le Père. Et qui accepte joyeusement cette dépendance. Il vit d’accueillir « tout ce que possède le Père » (Jn 16,15). Il l’accueille si bien qu’il peut dire : « c’est à moi ». C’est son obéissance parfaite qui permet cette possession. Une obéissance qui n’est pas soumission servile mais capacité de posséder tout ce qui est donné par le Père. Pour nous aussi, le lien à Dieu est sur ce mode du fils. Le baptême nous rend fils de Dieu, mais cela nous est difficile à vivre. Il nous faut lutter pour faire totale confiance au Père, pour résister à la tentation de nous gérer indépendamment de lui. C’est le grand chemin de la croissance chrétienne : apprendre à faire totale confiance au Père, jour après jour, au fil des événements et des choix à poser. Et alors notre obéissance nous ouvre l’infini : c’est en disant « tout mon être est à toi » que nous pouvons découvrons que tout ce qui est à Dieu est à nous, que nous sommes partout chez nous dans le monde, que nous n’avons rien à craindre, que même la mort fait place à la vie.
La vie du chrétien c’est donc imiter le Fils, pour être vraiment fils du Père nous aussi et vivre dans l’Esprit Saint. Pour vivre ainsi, la prière est indispensable. La prière, c’est comme plonger dans la Sainte Trinité. Et nous avons la chance de pouvoir enrichir notre prière en parlant de façon choisie à l’une des personnes ou aux trois ensemble. Nous disons « Seigneur », qui va pour chacun et tous ensemble. Ou nous disons selon les occasions « Père », « ô Christ », « Esprit Saint ». Cultivons la joie de vivre dans l’amitié d’un tel Dieu ! Et de pouvoir regarder le monde comme fondé dans l’amour et appelé à la victoire de l’amour. C’est bien la réalité du monde, et de même la réalité de nos vies à chacun et de la vie de ceux avec qui nous vivons, de ceux que nous croisons. Nous sommes là par amour et nous nous épanouirons dans la joie d’être aimé sans condition et de pouvoir aimer sans limite.