Notre vie{joomplu:14} est un don merveilleux de Dieu. Un don éternel. Nous qui n’existions pas, voilà que nous existons pour toujours, que Dieu nous appelle à une vie qui grandit sans cesse ! Alors, qu’est-ce qui remplira vraiment cette vie, qu’est-ce qui lui donnera sa plénitude ? « Celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui perd sa vie à cause de moi la gardera. » (Mt 16,25) Tout est là…

Tout est là car le sens de notre vie est d’être donnée. Il m’est arrivé d’aspirer à pouvoir vivre un peu pour moi, et tandis que je croyais trouver du bonheur je n’ai récolté qu’un profond vide, un de ces vides pas très clair, pas très visible, mais qui se trahit par une amertume qui reste à l’âme, par une incapacité à accéder à la joie intérieure, par une insatisfaction qui fait penser  : la vie ce n’est quand-même pas si formidable que ça.

Pour gagner sa vie, pour être rassasié de la joie d’exister, pour sentir l’Esprit qui rayonne en nous, il faut tout perdre. Mais pas n’importe comment ! Il faut tout perdre par amour. Perdre le temps qu’on pourrait se réserver, perdre les pensées mélancoliques qu’on aime nourrir secrètement, perdre l’argent que l’on croit légitime de garder puisqu’on l’a gagné, perdre telle habitude confortable qui accapare notre énergie et notre cœur, etc. Perdre tout cela par amour, pour se donner soi-même, pour s’ouvrir à quelqu’un et à Dieu. Le perdre pour sourire, pour chérir, pour soutenir, pour faire grandir.

Le sens de notre vie est d’être consacré. Et consacré à quelqu’un, à un être personnel, humain ou divin, humain et divin pour la plupart. Dès que nous découvrons que nous nous sommes plutôt mis à « fonctionner », à notre profit ou à celui d’une institution ou d’un idéal impersonnel, il faut nous ressaisir nous-mêmes, nous reprendre pour nous redonner, par amour cette fois.

L’amour de Dieu nous invite à cette aventure de la vie donnée. Aucune difficulté, aucune souffrance ne doit nous faire croire que ce chemin n’est pas pour nous. « Si quelqu’un veut marcher derrière moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. » (Mt 16,24) La croix, l’épreuve, vient tôt ou tard sans qu’on doive la chercher, et elle nous lance le défi d’un nouveau don de nous-mêmes. Je pense à quelqu’un qui était en phase terminale du cancer et qui demandait avant même qu’on ait pu lui adresser la parole  : comment vas-tu ? Voilà le don de soi jusqu’au bout. Quand le repli sur soi nous tente, le Christ nous demande de sortir de nous pour entrer dans une relation nouvelle, le suivre, devenir son complice dans le combat de l’amour sur le mal. Continuer en tout temps de s’intéresser aux autres alors qu’on voudrait se centrer sur soi-même, voilà le chemin de la lumière !

 Pour terminer, un poème, qui a donné son titre à cette homélie : voir ici.