homélie de la Toussaint 2014
Aujourd’hui{joomplu:142} nous ferons une visite du paradis pour nous rendre compte de ce que vivent les saints. C’est leur fête, l’Église nous invite à nous intéresser à leur vie car elle va être la nôtre aussi.
Dieu appelle à la vie, Dieu donne la vie, Dieu est la vie. C’est sa grande activité : la vie. Mais qu’est-ce que la vie ? Ce n’est pas la définition du biologiste qui nous intéresse ici mais ce que l’on désigne lorsque dans certains cas on dit : « ce n’est pas une vie ! » ou parfois : « on se sent vivre ! » Cette vie que l’on désire ressentir est une joie, une lumière, une détente en même temps qu’une exaltation, un élan en même temps qu’une possession. La vie passe par le cœur, elle se manifeste dans l’amour intense. Nous l’espérons grande et belle, souriante et heureuse. Nous sommes tentés de la remplir de choses, et même de penser qu’elle est constituée de choses à acquérir pour en profiter, mais à l’usage nous voyons bien que la vie est tellement au-delà de cela.
Et finalement nous sentons que nous aspirons à une vie plus pleine encore, cette vie dont parle une des prières de la messe au temps de Pâques au sujet du Christ : « En détruisant un monde déchu il fait une création nouvelle, et c’est de lui que nous tenons désormais la vie qu’il possède en plénitude » (Préface № 4 du temps pascal). Oui, nous aspirons à une plénitude, et c’est cette plénitude que vivent les saints. Toutes les joies de la vie terrestre ont été pour eux un avant-goût de cette vie en plénitude. Ils ont vécu toutes les peines comme un entraînement, un exercice d’agrandissement du cœur et de son désir de vie. C’est pourquoi la pénitence n’est jamais absente de la vie des saints : il leur fallait rappeler à leur désir intérieur que le plus grand désir doit se porter sur ce qui est à la fois essentiel et invisible : la source de vie elle-même, Dieu. Ils savaient bien qu’on ne peut pas se contenter du bonheur qui saute aux yeux. Il faut un peu écarter ces couches de bonheur-là, pour atteindre le cœur du bonheur, la vie que Dieu fait battre au fond de chacun, une vie qui nous réjouit déjà et qui attend la victoire de la résurrection finale.
Les saints possèdent la vie en plénitude, ils se sentent vivre sans cesse, ils jubilent de cette vie qui se voit dans leurs yeux émerveillés. Les saints s’émerveillent de Dieu, comme on s’émerveillerait d’un paysage si on pouvait saisir la source de sa beauté. Les saints s’émerveillent aussi les uns des autres, ils sont constamment un sujet de joie mutuel. Leur vie n’est pas lassante car elle va de progrès en progrès. Les saints sont vraiment les cœurs purs et les pauvres de cœur, qui cherchent de moins en moins à posséder et qui pour cela sont de plus en plus comblés.
S’ils y sont parvenus, ce n’est pas d’abord par leurs efforts, mais c’est le don de Dieu, c’est ce que le Christ leur a acquis contre toutes les forces d’égoïsme et de domination. Ils ont « lavé leurs vêtements, ils les ont purifiés dans le sang de l’Agneau » (Ap 7,14). Les efforts nombreux que les saints ont faits, ils les ont accomplis pour s’ouvrir à ce don de Dieu, pour recevoir de lui la sainteté.
Et enfin ils aspirent à nous faire partager ce bonheur intense qui les habite. Alors ils posent un regard de douceur et de bonté sur nous, et le Seigneur leur permet de nous venir en aide. Avez-vous déjà demandé à un proche décédé de vous aider ? Il faut le faire. Vous verrez, chacun a sa spécialité, selon ce qu’il était sur la terre, selon ce qui lui tenait à cœur. Même les âmes du purgatoire, que j’évoquerai demain, on ce pouvoir de nous aider par la bonté du Seigneur. A fortiori ceux qui déjà ont terminé la purification qui leur fait goûter le Royaume de tous leurs sens aiguisés.
(voir aussi l’homélie de la Toussaint 2013, 2012 et 2006.)